seront que plus durables, et les Collections Gatteaux survivront dans la mémoire publique à leur ruine, comme le nom de l’homme bienfaisant qui les avait formées gardera ses droits au respect des artistes, des amis de l’art et du pays.
Quelles qu’eussent été pendant le siège et pendant la Commune les préoccupations ou les angoisses auxquelles les événemens de chaque jour condamnaient les habitans de Paris, quelque suspension forcée qu’eût amenée cette période néfaste dans les travaux et dans les affaires, l’Académie des Beaux-Arts n’en avait pas moins voulu jusqu’au bout continuer de vivre, ou plutôt de paraître vivre de sa vie accoutumée. Depuis le moment où la ville avait été investie par les armées allemandes jusqu’à celui où l’armée française l’eut délivrée de la tyrannie qu’elle subissait à l’intérieur, pas une fois les membres de l’Académie présens à Paris ne manquèrent de se réunir à l’Institut pour y tenir leurs séances hebdomadaires : tristes séances, d’ailleurs, que, faute d’occupations déterminées et de questions à l’ordre du jour, on remplissait tant bien que mal ; mais ces réunions, si stériles, en réalité, qu’elles fussent, avaient au moins cet avantage de procurer à chacun de ceux qui y avaient assisté une sorte de satisfaction de conscience, l’illusion d’un devoir accompli, alors même que ce devoir se réduisait à un simple acte de présence, protestation implicite contre les désordres ou les criminelles folies du dehors.
Cependant, les neuf mois écoulés entre la fin du second empire et celle de la Commune n’avaient pas été pour l’Académie une époque toute d’épreuves et de souffrances patriotiques. La mort, en frappant deux de ses membres, Duban et Auber, était venue ajouter des deuils de famille aux douleurs qu’elle partageait avec la nation. Retenu loin de Paris, au moment du siège, par une maladie qu’allait de plus en plus aggraver la succession de nos revers, Duban avait suivi avec une anxiété fiévreuse, avec désespoir bientôt, les progrès de l’ennemi sur notre sol : « Je suis à bout de résignation, écrivait-il à l’un de ses amis dès les premiers jours de l’invasion. » Qu’eût-il ressenti quelques mois plus tard en face des ruines faites dans Paris par les incendiaires ? Un aussi désolant spectacle lui fut du moins épargné, et lorsqu’il succombait à Bordeaux, le 8 octobre 1870, il pouvait croire encore que les ennemis venus de l’autre côté du Rhin étaient les seuls dont nous eussions à subir les vengeances.
Auber, lui, vécut assez pour être jusqu’au bout témoin de nos malheurs et pour les partager sous toutes leurs formes. Il avait voulu, alors que tant d’autres s’en éloignaient à moins bon droit, demeurer renfermé dans les murs de ce Paris auquel l’attachaient