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à 500. La souscription sera ouverte vers le 21 ou 25 courant, en France, en Belgique, et en Suisse, à 225,000 de ces titres.

Le gouvernement russe vient d’émettre un « troisième emprunt intérieur 4 pour 100 » au montant nominal de 194 millions de roubles, dont le produit est destiné à la conversion ou au remboursement de 184,198,350 roubles de billets 5 pour 100 de la Banque de l’État. L’intérêt est payable semestriellement en juin et en décembre, et l’amortissement de ces obligations s’effectuera au pair en quarante années à dater du 15 juin 1892. Jusqu’en 1899, il ne pourra être procédé ni à la conversion, ni au remboursement de cet emprunt. Les obligations du « troisième emprunt intérieur » sont soumises à l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières.

Il s’agit là d’une opération exclusivement russe, à laquelle n’ont point de part, au moins directement, les capitaux étrangers. Il n’en est pas de même d’une seconde opération qui suit immédiatement la création du troisième 4 pour 100 intérieur, et qui a pour objet l’émission en France et en Allemagne d’un très gros emprunt en 3 pour 100, le premier de ce type, et dont le produit serait également destiné à des conversions. L’émission n’aurait, d’ailleurs, lieu en Allemagne que contre les titres à convertir. La souscription en espèces aurait lieu en France. Le ministre des finances de Russie a traité, pour cet emprunt, avec les maisons Rothschild et Bleichrœder et avec la Disconto-Gesellschaft de Berlin. L’opération serait effectuée au commencement du mois prochain.

La Russie est certainement dans une excellente situation financière, et son crédit, grâce au concours des capitaux français, a réalisé en quelques années d’importans progrès. Il y a moins de dix ans, le 5 pour 100 russe était au-dessous de 90 francs. Aujourd’hui, le 4 pour 100 est à 100 francs. C’est l’épargne française, qui, par suite d’un engouement très respectable, inspiré par des motifs politiques et financiers de l’ordre le plus sérieux, a pu réaliser cet extraordinaire changement de capitalisation. Ce n’est plus par centaines de millions, mais par milliards que se calcule la valeur des titres de la dette russe absorbés par les portefeuilles français. Peut-être serait-il sage, après avoir tant obtenu du concours de l’argent français, de ménager un peu une telle faculté d’absorption, sous peine de découvrir, au moment le plus inattendu, que l’on en avait déjà atteint la limite. Les sympathies de la France pour la Russie ont porté le 4 pour 100 russe au pair. C’est beaucoup leur demander que de prétendre dès maintenant remplacer le 4 pour 100 par du 3 pour 100 alors que notre propre 3 pour 100 ne se maintient pas sans peine à 95 francs et que nous avons du 4 1/2 à moins de 106 francs.


Le directeur-gérant : CH. BULOZ.