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REVUE DRAMATIQUE

Théâtre de l’Odéon : Amoureuse, comédie en 3 actes, de M. George de Porto-Riche.

Il y a, paraît-il, des gens d’esprit, mais d’esprit joyeux, que Mariage blanc a beaucoup amusés ; que n’a pas émus l’agonie de Simone et que son innocence a fait pleurer… de rire. Le drame de M. Lemaître leur a paru fade, et trop pâle la petite mourante. Je leur recommande la comédie de M. de Porto-Riche. Voilà un mariage qui n’est pas blanc ! Quel ragoût, bon Dieu, que de piment et d’épices ! Nous sommes loin de l’unique baiser de Jacques à Simone. Sur les lèvres d’Étienne Fériaud, voilà huit ans que pleuvent les baisers de son insatiable petite femme, baisers de maîtresse plutôt que d’épouse, qui ne sentent plus la fleur d’oranger, ceux-là, mais le Champagne et la bisque, et qui emportent la bouche.

Du sujet de la pièce il ne reste pas grand’chose à dire. On sait qu’Étienne Fériaud n’a plus tout à fait la force, ni l’âge, ni l’envie de répondre dignement à la tendresse exigeante de sa femme. Il reçoit plus qu’il ne donne et qu’il ne demande. Il a maintenant en tête, dans sa tête qui grisonne, autre chose que l’amour, du moins que ce genre d’amour. Il aime encore, mais il voudrait de temps en temps se reposer d’aimer. Avec de l’intelligence, du talent, il a le goût et le besoin de l’étude, la légitime ambition du succès ; c’est un laborieux et un savant. Mais Germaine, qui se soucie de la science aussi peu que du travail, dispute à l’une et à l’autre les moindres instans que voudrait leur réserver Étienne. Elle le suit et le poursuit, le harcèle ; s’il reste à la maison,