Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 105.djvu/555

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA
TRADITION DU LATIN
EN FRANCE

Le système d’instruction d’une nation est une chose qui ne s’improvise pas : il met des siècles à se former. Celui que nous suivons remonte, à travers l’Université impériale de 1808, à Rollin, aux oratoriens, à Port-Royal, aux jésuites, à la renaissance, et de là, par-dessus le moyen âge, dont il a pourtant emprunté certaines choses, aux écoles des rhéteurs anciens, à Quintilien. Il est possible que ce système soit à réformer. Mais ce qui est très sûr, c’est que la réforme demandera un long temps : on peut compter qu’il y a là du travail pour une partie du XXe siècle. Le temps que j’indique ici paraîtra court à ceux qui ont quelque idée de la lenteur avec laquelle s’opère ce genre d’évolution[1].

On a vite fait de proscrire des exercices, la difficulté commence au moment où il faut les remplacer. D’ordinaire, on les voit continuer leur existence sous une forme plus ou moins dissimulée : ils continuent de prendre le temps de la classe, sans avoir leur ancienne efficacité. C’est que les réformes pédagogiques présentent ce caractère particulier qu’on est obligé d’en confier l’exécution au personnel réformé.

A supposer que les langues anciennes doivent perdre l’importance qu’elles ont eue jusqu’à présent, nous avons lieu de croire que ce grand changement ne sera pas instantané, et que pendant plusieurs générations encore elles feront la base de l’éducation d’une bonne partie de la jeunesse. Le personnel de professeurs qui

  1. Voir à ce sujet les remarques de M. Boissier, la Fin du paganisme.