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de sensations. Leur exemple n’est pas toujours suivi. De très remarquables études, le Pont de Brooklyn, par M. Renouf, la Meuse à Verdun, de M. Petitjean, la Neige sur les buttes Montmartre, de M. Cagniart, l’Hiver dam la forêt de Fontainebleau et Après la moisson, de M. Rigolot, les Regains, de M. Quignon, Sous les pins en Provence, de M. Paulin Bertrand, le Plein midi en Auvergne, de M. Gagliardini, la Prairie au soleil levant, de M. Le Liepvre, la Plaine de la Demoiselle, par M. Desbrosses, toutes peintures d’un bel effet, et d’une science sérieuse, n’auraient point perdu à se condenser. Il y a un plus juste sentiment de la proportion à établir entre la grandeur du cadre et l’impression à y fixer chez MM. Demont (les Marguerites), Pierre Brandt (l’Hiver à Villeneuve-la-Garenne), Martin (la Moisson en Provence), Lopisgich (Valvins près Fontainebleau), Camille Dufour (le Pont Saint-Bénézet et le Palais des papes à Avignon), Mlle Bill (le Village de Gruissan), M. Nardi (un Quai au soleil couchant''). Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur la plupart de ces bons paysagistes en les comparant avec leurs émules du Champ de Mars.

Si l’on termine sa promenade au Salon par l’examen des bonnes peintures d’animaux et de nature morte qu’on y rencontre, le Taureau normand et la Ferme en Hollande, de M. Howe, les Bœufs sur la rive, de M. Bisbing, les bestiaux de MM. Vayson, Pezant, C. Paris, Julien Dupré, Barillot, Vuillefroy, les chevaux de MM. Frère, Quinton, Claude, Veyrassat, les Œufs sur le plat de M. Joseph Bail, le Déjeuner de chasseurs, de M. Fouace, l’Argenterie, de M. Vollon, et les Objets d’art, de M. Blaise Desgoffe, on sera convaincu que, dans tous les genres, à tous les degrés de l’art, le Palais des Champs-Elysées, malgré l’abandon d’un certain nombre de sociétaires distingués, réunit encore la plupart des maîtres en activité, et l’on admirera la variété des manifestations par laquelle professeurs et élèves y affirment à la fois l’étendue de leurs études et l’indépendance de leurs talens. La Société des artistes français n’impose évidemment aucune doctrine à ses exposans ; elle semble très résolue à accueillir tous les mérites, à quelque école qu’ils se rattachent, sans demander de professions de foi ; elle reste en cela fidèle à l’esprit de son institution. L’État, en effet, lorsqu’il l’a constituée, lui a confié à la fois une mission d’enseignement public et d’encouragement impartial. La Société remplira d’autant mieux cette double mission qu’elle se montrera plus sévère pour les médiocrités inutiles.et pour les charlatanismes dangereux.


GEORGE LAFENESTRE.