Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 106.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On reconnut, comme lui, que ce bacille existe chez tous les tuberculeux, et qu’il est l’élément caractéristique de la maladie. On constata sa présence, non-seulement dans les organes des phtisiques et dans les produits de leur expectoration, mais encore, bien qu’en moindre quantité, dans la plupart des lésions jusqu’alors rapportées à la scrofule.

Depuis cette époque, la tuberculose est le sujet dont les physiologistes s’occupent avec le plus d’ardeur. Toutes les sociétés savantes l’ont mis à l’ordre du jour ; des enquêtes ont été ouvertes en Angleterre, en Allemagne, en Italie et en France. A Paris, une association de jeunes médecins s’est formée, à l’appel du docteur Verneuil et sous sa direction, pour se livrer à cette étude spéciale. Elle a son laboratoire et son organe particulier, qui a pris en 1887 le titre de Bulletin de la phtisie pulmonaire. Enfin, au mois de juillet 1888, un congrès de médecins et de vétérinaires, ayant pour objet l’étude scientifique de la tuberculose, s’est réuni à Paris sous la présidence de M. Chauveau. Je reviendrai plus tard sur les résolutions qui y ont été votées ; mais il faut auparavant dire quelques mots du micro-organisme dont la découverte a produit tout ce mouvement.

Il est tellement petit, qu’on ne le distingue nettement qu’à la faveur des plus forts grossissemens. Il apparaît alors sous la forme d’un bâtonnet très mince, effilé à ses extrémités, et dont la longueur ne dépasse pas le quart du diamètre d’un de ces globules dont chaque goutte de sang renferme une dizaine de millions. Il se reproduit au moyen de spores ovoïdes très petites et très réfringentes. Pour leur donner naissance, il se divise en trois ou quatre segmens dont chacun contient une spore. Une fois détachées du bâtonnet, celles-ci deviennent invisibles, parce qu’aucune matière colorante connue ne peut les déceler.

Les bacilles de la tuberculose ne se développent que dans le corps de l’homme et des animaux ; mais ils peuvent vivre au dehors à l’état de spores, pour reprendre leur activité quand ils rentrent dans un milieu qui leur est favorable. A cet état de vie latente, ils ont une résistance considérable. La putréfaction, la dessiccation, ne leur ôtent rien de leur virulence, qui se conserve intacte pendant plusieurs mois. Ils peuvent, pendant ce temps, supporter de hautes températures, et c’est à peine si l’ébullition les détruit. Le professeur Sormain, de l’université de Pavie, a constaté que le fait qui renferme des bacilles peut encore communiquer la tuberculose à des cobayes, après avoir été porté jusqu’à la température de 100 degrés. Pour lui faire perdre cette propriété, il faut le faire bouillir pendant quelques instans. Toutefois, il est admis dans la pratique qu’une température de 100 degrés suffit pour le détruire.