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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 août.

A peine les chambres sont-elles parties, les vacances s’ouvrent pour tout le monde, depuis M. le président de la république qui va chercher le repos sous les paisibles ombrages de Fontainebleau, jusqu’aux écoliers qui vont oublier dans leurs familles les controverses sur l’enseignement classique et l’enseignement moderne dont on les entretenait naguère au grand concours. La politique, au moins la politique intérieure, suivant l’invariable usage, sommeille à demi. Ce n’est pas que dans cette trêve périodique et bienfaisante il ne reste encore bien des questions obscures, des incohérences morales, de mauvais fermens, des menaces de crises du travail, des grèves, des conflits obstinés. Les agitations ouvrières, pas plus que les luttes de partis, ne s’arrêtent à volonté pour le plaisir de ceux qui aiment la quiétude ou qui cherchent la distraction et l’oubli dans les voyages ; mais somme toute, pour le moment, la France est au repos plus qu’aux agitations, aux incidens bruyans, aux violences de polémiques et aux grèves. On échaufferait difficilement un public inattentif pour les revendications des terrassiers et des puisatiers ; on aurait de la peine à passionner les esprits pour des querelles de fantaisie. Tout ce qu’on pourrait tenter se perdrait dans cette grande et pacifique diversion des vacances qui est toujours attendue, et laisse pour quelques mois le pays à sa tranquillité. La politique intérieure, aujourd’hui, elle n’est nulle part, ou, si l’on veut, elle se réduit à des discussions assez vaines, à des discours que les ministres, dispersés par la saison, sèment sur les chemins, à une distribution de prix, à un banquet, à une inauguration de voie ferrée, à propos de tout et à propos de rien.

Le malheur est que, dans ces discours ministériels qui se succèdent, tout est parfois assez mêlé, et qu’on ne sent pas un esprit de gouvernement bien assuré, bien clair, bien propre à inspirer une confiance sans limite. Les orateurs officiels se livrent assez souvent à leur