Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 107.djvu/897

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étranger, il devra être conduit le plus tôt possible dans un port ou à une autorité de la nation dont il a arboré les couleurs, de telle manière que la sincérité du pavillon soit constatée par les autorités de la puissance à laquelle appartient ce pavillon. » C’est ce qu’a répété l’article 49 de l’Acte général.

Cependant les adversaires de cet acte diplomatique ont considéré la reproduction des instructions exécutées depuis vingt-quatre ans comme une innovation monstrueuse. « Vraiment, nous en sommes là ! Peut-il y avoir rien de plus offensant, de plus blessant au monde que d’être forcé de s’arrêter dans sa route sur l’ordre d’un étranger, de le recevoir à son bord, de se justifier devant lui et de le suivre s’il trouve bon de vous arrêter? » Nous en étions là non pas seulement dans cette période de dix ans où la France avait eu le tort de subir le droit de visite, mais après qu’elle l’avait répudié. L’acte de Bruxelles ne modifiait la pratique antérieure et postérieure à la révolution de 1870 que dans un sens favorable à notre politique. Il importe de faire observer que les pouvoirs publics, en refusant de le sanctionner, nous laissent sous l’empire des accords actuels, c’est-à-dire d’un régime beaucoup moins favorable à la liberté des mers. Oui, nous en gardons tout ce qu’on reproche à la convention nouvelle, et nous perdons tout ce que celle-ci a fait pour l’améliorer, tout le fruit d’une campagne heureusement et sagement conduite. On a supplié la chambre « de ne pas déchirer une des pages les plus glorieuses de nos annales nationales. » Il s’agit apparemment de la page écrite au congrès de Vérone. Eh bien! c’est en 1831 et en 1833 qu’elle avait été déchirée: nous l’avons, qu’on me passe cette expression triviale, recousue en deux fois, d’abord le 29 mai 1845, ensuite le 2 juillet 1890. Loin de trahir ces droits des neutres, que nous défendions au dernier siècle avec l’aide de la Russie et des petits États maritimes, nous les défendons encore. En reportant ma pensée sur l’entreprise achevée en 1780 par M. de Vergennes, alors que les diplomates français dictaient l’exposé de principes par lequel l’impératrice Catherine II résolvait les questions fondamentales du droit public maritime, je crois que l’œuvre de la diplomatie contemporaine ne serait pas désavouée par ces grands ancêtres.

Pour bien mesurer tout le terrain reconquis en 1891, il n’est pas inutile de rappeler que la France, l’Allemagne, l’Angleterre, la Belgique, le Danemark et la Hollande signèrent à La Haye le 6 mai 1882 une convention sur les pêcheries de la mer du Nord. Nous en citons textuellement quelques dispositions : « Les bâtimens croiseurs de toutes les hautes parties contractantes sont compétens pour constater toutes les infractions aux règles prescrites par la présente convention autres que celles indiquées dans