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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 108.djvu/241

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de M. de Vollmar qu’à l’égard des jeunes socialistes, et peu s’en est fallu que M. de Vollmar ne fût à son tour excommunié, on ne voit pas trop pourquoi. Une motion d’exclusion avait été déjà déposée contre lui : il en a été quitte pour un avertissement !

Au demeurant, ce congrès qui vient d’avoir sa session de quelques jours à Erfurt et qui ne s’est pas séparé sans prendre un nouveau rendez-vous pour l’année prochaine à Berlin, ce congrès n’aura peut-être pas été une campagne des plus heureuses pour le socialisme allemand. Il aura dévoilé les incohérences, les rivalités, les divisions de l’armée socialiste, l’intolérance de ses chefs. Il aura été plus bruyant que profitable pour le parti, et par une bizarrerie ou une inconséquence de plus, les meneurs d’Erfurt, après avoir excommunié les jeunes socialistes, n’ont trouvé rien de mieux que de clore à leur tour leurs travaux par une sorte de testament ou de programme qui n’a certes rien de nouveau, qui est le modèle le plus complet de radicalisme anarchique. Tout y est un peu pêle-mêle : suffrage universel étendu aux deux sexes, émancipation des femmes, gouvernement direct du peuple, élection de toutes les autorités et des juges, substitution de la garde nationale à l’armée permanente, impôt progressif, organisation du travail au profit des ouvriers, guerre au capital bourgeois, monopole de l’État dans les assurances sous le contrôle des ouvriers, etc. A la vérité, ce n’est qu’un idéal, dont M. Singer, M. Bebel, M. Liebknecht ne promettent pas la réalisation immédiate, ni même prochaine, dont ils n’entendent, au contraire, poursuivre l’application que par les moyens légaux et parlementaires. Reste à savoir comment ces habiles équilibristes de l’anarchie concilieront les programmes de destruction qu’ils livrent aux passions des masses et les tactiques bourgeoises par lesquelles ils se flattent de réussir, — s’ils pourront résister longtemps au jeune socialisme qui les presse. C’est le problème qui s’est posé au congrès d’Erfurt, qui se retrouvera plus d’une fois en Allemagne et dans bien d’autres pays.

Les affaires publiques ne vont pas toutes seules, c’est bien certain, ni en Allemagne ni ailleurs. Elles se compliquent de tant d’intérêts, de tant de conflits intimes ou inévitables, que la plupart des nations, même les plus paisibles, ne sont jamais à l’abri des crises, au moins des embarras dans leur vie intérieure, comme dans leurs rapports extérieurs. On ne peut certes pas dire que l’Espagne, notre sympathique voisine du Sud, soit aujourd’hui dans un de ces momens de crise ; on ne peut pas dire non plus qu’elle n’ait, à l’heure qu’il est, des embarras ou des sujets de préoccupation qui vont sans doute se préciser et se fixer avec la rentrée du monde officiel et parlementaire à Madrid. Maintenant l’été est passé ! les vacances finissent en Espagne comme partout. La reine régente, qui est restée pendant quelques mois dans le pays basque, vient de reprendre, avec son fils, le petit