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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 108.djvu/319

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qualités nouvelles, mais pour la première fois peut-être, il a parlé haut à l’imagination du public.

La réparation des ponts de chemin de fer par les belligérans est l’une des opérations les plus délicates de la guerre, mais l’une de celles qui se présentent le plus souvent, dont l’importance est la plus grande, qui demandent à être conduites avec le plus de célérité. Dès que la circulation des voies ferrées se trouve interrompue par la rupture d’ouvrages d’art importans, le mouvement en avant des armées est paralysé : l’arrivée de ses subsistances, le transport de son matériel, subissent les plus dangereux retards. Dès lors, la nécessité de créer un matériel spécial en métal, au lieu des matériaux en bois, auxquels on se résignait naguère pour arriver à franchir rapidement, dans des limites de largeur donnée, une brèche quelconque. L’expérience faite pour le lancement du pont métallique de Matthaux avec les appareils du colonel Marcille a réussi à merveille. Le thème des manœuvres supposait que le pont de chemin de fer situé sur la ligne de Troyes-Briennes, à proximité de la station de Matthaux, avait été détruit le 5 septembre ; le 11, à cinq heures du soir, tout était « rétabli, » et le 12, au matin, la première locomotive, filant à toute vitesse, passait sur le pont en tôle d’acier. Il avait fallu six jours pour faire ce que les Allemands, en 1870, avaient péniblement réussi en un grand mois.

L’établissement des ponts sur l’eau n’a pas été moins remarquable. Jusqu’à présent, les compagnies du génie n’avaient eu à compter pour ce genre d’opérations que sur les matériaux à trouver sur place, bateaux, arbres, poutres en planches. On en faisait, après quelque perte de temps, des chevalets rapides et des radeaux. Le génie a tenté cette année un essai qui devra sans doute être perfectionné, mais dont les résultats ont été déjà très satisfaisans. Chaque compagnie a été pourvue d’un haquet chargé de toutes les pièces nécessaires pour constituer deux travées légères de pont, permettant ainsi de franchir une brèche de 10 à 11 mètres. En réunissant le matériel de plusieurs compagnies, on peut d’ailleurs construire sans peine des ponts d’avant-garde plus importans. C’est ce qu’a fait, par exemple, dans la manœuvre du 4 septembre, le commandant du génie du 5e corps pour construire, près de Ragnicourt, un pont de 40 mètres sur lequel l’infanterie tout entière a défilé pendant que l’artillerie profitait d’un gué voisin. — Par un contresens fâcheux, le corps des pontonniers est encore rattaché à l’artillerie, qui ne devrait pourtant souhaiter que de s’alléger de tout ce qui n’est pas le canon.

Enfin, le service télégraphique et téléphonique, dont la préparation technique appartient en temps de paix au génie, n’a pas