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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 109.djvu/835

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II

Par l’ordonnance du 15 août 1815, « l’organisation des académies, — celle qu’avait rétablie Napoléon aux Cent Jours, — était provisoirement maintenue. » « Notre ordonnance du 17 février n’ayant pu être mise à exécution, disait le préambule, et les difficultés des temps ne permettant pas qu’il soit pourvu aux dépenses de l’instruction publique, ainsi qu’il avait été statué par notre susdite ordonnance, voulant surseoir à toute innovation importante dans le régime de l’instruction publique jusqu’au moment où des circonstances plus heureuses que nous espérons n’être pas éloignées nous permettront d’établir par une loi les bases d’un système définitif… » Ce n’était donc qu’un sursis, mais avec un sursis, c’était la vie, et tout allait dépendre de l’usage qui en serait fait. En même temps, et pour bien marquer les changemens survenus dans l’État, on amoindrissait l’institution. Plus de Grand-Maître, plus de chancelier, plus de trésorier, plus de Conseil de l’Université ; mais, à leur place, exerçant tous leurs pouvoirs, une commission de cinq membres, placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur.

En elle-même, c’était une institution vicieuse que cette sorte de Conseil des cinq. Elle avait le tort de confondre aux mêmes mains des pouvoirs fort différens d’initiative, d’exécution, d’administration et de justice, que le statut de 1808 avait sagement répartis entre le Grand-Maître et le Conseil. Elle avait le tort plus grand encore de trop séparer le gouvernement de l’Université du gouvernement du pays ; indépendance apparente qui pouvait promptement devenir une faiblesse irrémédiable. Ainsi constituée, cette Commission de l’instruction publique ne pouvait valoir que ce que vaudraient les hommes. Elle valut beaucoup avec des hommes comme Royer-Collard et Cuvier[1]. Pendant près de cinq ans, elle exerça sur l’instruction publique une véritable dictature, et si l’Université fut sauvée, c’est parce qu’il fut établi en ces cinq années qu’elle pouvait être isolée de son auteur, et qu’en elle il n’y avait, au fond, rien d’incompatible avec la monarchie.

La tâche n’était pas aisée. Il y avait à désarmer bien des défiances, à vaincre bien des difficultés, à éviter bien des périls. Nous devons en borner ici le tableau à l’ordre de l’enseignement supérieur.

L’ordonnance du 15 août l’avait nettement avoué, une des causes du maintien provisoire de l’Université était la pénurie des

  1. Thiers, Chambre des députés, session de 1846.