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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 110.djvu/248

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épineuses pour mener à fin une combinaison que, de gré ou de force, chacun devait finir par accepter. Si cette étude un peu compliquée paraît stérile au premier abord, puisque ces débats n’eurent aucune suite immédiate, on y trouvera tout au moins l’avantage de bien définir de quels sentimens réciproques restèrent animées les diverses puissances qui vinrent, l’une après l’autre, et toutes de mauvaise grâce, mettre leurs signatures au bas du traité de paix : et comme cette paix elle-même ne devait durer, on le sait, que très peu d’années, on est ainsi en mesure de prévoir dans quelles conditions devront s’engager, après un délai très court, de nouveaux et plus graves conflits. On voit déjà à découvert non-seulement se préparer, mais presque s’accomplir, la grande révolution diplomatique, qui, en rapprochant du même coup la France de l’Autriche, et la Prusse de l’Angleterre, changea toutes les traditions d’une politique séculaire, et qui est demeurée jusqu’à nos jours l’objet de tant de contestations. En sorte qu’à le bien prendre, les faits qu’il nous reste à faire connaître forment moins le dernier chapitre de la guerre de la succession d’Autriche que le premier de la guerre de sept ans.


I

En réalité, à la manière dont les préliminaires avaient été préparés et conclus, ce fut déjà une merveille que d’arriver à en faire admettre la discussion par les puissances qu’on n’avait pas appelées à y prendre part : tant était grand, le premier jour, le trouble, c’est trop peu dire l’indignation, que par leur initiative mystérieuse et hardie, les plénipotentiaires d’Angleterre et de France avaient causé à leurs collègues. C’était, on l’a vu, un tolle et un récri général : petits et grands, tous se plaignaient, tous se regardaient comme joués ou lésés : Sardaigne, Espagne, Autriche, et jusqu’aux modestes cliens à qui la France avait promis son appui : l’électeur palatin qu’on avait oublié de nommer, la république de Gênes et le duc de Modène, qui trouvaient mauvais qu’en leur restituant leurs États, on ne parlât pas de leur accorder les intérêts des biens et des capitaux qu’on leur avait confisqués. Il ne fallut pas moins, pour imposer un peu de silence à ces clameurs discordantes, que l’accueil favorable et presque enthousiaste fait au seul mot et à la seule espérance de paix, par les populations souffrantes. Mais ce qui contribua aussi bientôt à calmer les mécontens et à leur faire prendre le ton plus bas, ce fut qu’il ne se trouva aucun terrain commun sur lequel ils pussent mettre leurs griefs d’accord pour en poursuivre ensemble le redressement. Ce dont chacun d’eux, au