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Elle contient précisément un compte rendu de la fête (commentarium ludorum sœcularium), c’est-à-dire la série des actes officiels qui l’ont précédée et préparée, avec un récit très succinct des principales cérémonies. Je demande la permission de reprendre toutes ces pièces l’une après l’autre, au risque de fatiguer un peu l’attention du lecteur. Mais il me semble que ces détails ont leur prix, il n’est pas sans intérêt, puisque l’occasion s’en présente, de se donner le spectacle d’une des plus grandes fêtes auxquelles le monde ait assisté avant la naissance du Christ.

L’empereur voulait qu’elle eût le plus d’éclat possible, et l’on nous dit que, par son ordre, des hérauts parcoururent les villes de l’empire, convoquant le peuple à des jeux « que personne n’avait vus et que personne ne devait revoir. » C’est aussi la pensée qui a inspiré les actes officiels dont je viens de parler et par lesquels débute notre inscription. On y trouve d’abord les fragmens d’une lettre qu’Auguste adresse aux quindécimvirs. Quoiqu’elle soit très mutilée, il est facile de voir qu’il leur demande de bien instruire le peuple de ce qu’on va faire, afin que tout s’accomplisse avec régularité, et surtout de ne rien négliger pour que l’assistance soit nombreuse.

Les quindécimvirs, mis ainsi en demeure d’agir, prennent alors la parole. — Mais, comme ils vont avoir le premier rôle dans la célébration de la fête, il est bon, je crois, de rappeler d’abord en quelques mots ce qu’ils étaient. Les prêtres à Rome formaient des corporations, ou, comme on disait, des collèges, parmi lesquels il y en avait quatre qui, par leur situation et leurs prérogatives, dominaient tous les autres (quatuor amplissima collegia.) L’un d’eux était celui de quindécimvirs, qu’on appelait de leur nom officiel Quindecimviri sacris faciundis. Leur origine remontait très loin ; ils avaient été, disait-on, institués par Tarquin au moment où la sibylle de Cumes lui apporta ses prophéties. Ils étaient chargés de les garder ; ils les consultaient, quand il était besoin de le faire, ils les interprétaient, et veillaient à l’exécution des volontés divines. Mais, avec le temps, leurs fonctions s’étaient fort étendues. Comme les cultes étrangers pénétraient surtout au moyen des oracles sibyllins, les quindécimvirs en étaient devenus les patrons naturels, et leur clientèle s’augmentait sans cesse, depuis que Rome s’était si largement ouverte aux dieux de la Grèce et de l’Orient. Leur importance égalait presque celle des pontifes, surveillans et défenseurs du culte national, et les fêtes qui se préparaient allaient l’accroître encore ; elles reposaient, on vient de le voir, sur un oracle de la sibylle et par conséquent rentraient dans les attributions du collège. Pour l’année 737, Auguste en avait été nommé