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pendant les mauvais temps elle est déracinée par les chevaux piétinant tous à la même place ; partout où ceux-ci passent, ils laissent des trous qui deviennent fort dangereux lorsque le sol se durcit, et il est à peu près impossible de remédiera tous ces inconvéniens, car on ne peut visiter de telles étendues, et il ne serait pas prudent d’entrer avec des instrumens dans les prairies pendant que les animaux y sont ; on ne peut pas non plus les rentrer tous ensemble quand le temps est mauvais, ni même courir après eux à de longues distances pour les examiner.

Dans de petites prairies au contraire, il serait très facile au chef de dressage ou au stud-groom de passer presque chaque jour avec un fouet pour faire trotter et galoper les poulains, leur donner un exercice qui fortifierait déjà leurs membres et leurs poumons et permettrait de juger leurs aptitudes. Les animaux se trouvant dispersés par très petits groupes, il y aurait bien moins de risques d’accidens et de maladies ; le sol serait moins défoncé ; on pourrait aisément boucher les trous à certaines heures, laisser reposer à tour de rôle chaque prairie pour la herser, niveler, fumer, y mettre des bœufs ou des moutons ; l’herbe serait beaucoup plus abondante, de meilleure qualité et ne se perdrait pas.

Les prairies étant divisées comme nous l’avons dût, il faut encore avoir des écuries suffisantes pour pouvoir y rentrer tous les chevaux quand on le juge nécessaire, car il n’est pas admissible qu’on possède un plus grand nombre d’animaux qu’on n’en peut loger. Ces écuries, avec greniers et chambres de grooms, doivent être placées de distance en distance à proximité des prairies, de manière à rendre le service très facile et à éviter la contagion des maladies, de manière aussi qu’on puisse y distribuer l’avoine régulièrement sans qu’elle soit gaspillée et se rendre exactement compte de ce que chaque cheval mange.

Qu’on ne prétende pas qu’une pareille installation coûterait trop cher. En réalité, si l’on n’a pas encore adopté le système que nous préconisons, c’est uniquement parce que l’on a peine à s’affranchir de la routine. Les dépenses ne seraient nullement supérieures à celles que font tous les négocians intelligens pour mettre en ordre et conserver en bon état des marchandises bien moins précieuses. On pourrait facilement entretenir cinq ou six chevaux sur chaque hectare de pré, ce qui serait une énorme économie, puisque actuellement on ne met guère qu’un cheval par hectare ; la plus grande partie des terrains abandonnés jusqu’ici aux animaux serait occupée avec beaucoup plus de profit par des fermes qui produiraient tout ce qui est nécessaire à la nourriture des hommes et des bêtes.

Nous avons discuté ces questions, non avec des éleveurs de chevaux, trop disposés à croire qu’il n’y a rien à changer à leur