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divise les prairies, et que, par conséquent, ils peuvent eux-mêmes, par les moyens que nous avons indiqués, élever sur quelques hectares de terre un nombre relativement considérable de chevaux. S’ils ne pouvaient donner à ces animaux des soins aussi réguliers que dans les grands établissemens, ils essaieraient du moins de se rapprocher le plus possible des modèles qu’ils auraient sous les yeux ; au besoin ils vendraient leurs poulains dès le sevrage aux grands éleveurs, et ceux-ci exerceraient la plus utile influence sur la production de tout le pays, en dirigeant le choix des étalons et des poulinières, et en exigeant les cartes d’origine de tous les poulains qu’ils achèteraient.

Qui peut le plus peut le moins. Il est évident que, lorsqu’il y aura chez nous abondance de chevaux de luxe, la remonte ne sera pas embarrassée pour trouver sur notre territoire un nombre plus que suffisant d’animaux de bonne origine et bien élevés, et comme ces animaux seront ceux que les marchands auront dédaignés, elle n’aura pas à les payer plus cher que ceux d’aujourd’hui qui valent beaucoup moins.

Ce qui est certain, c’est que notre sol et notre climat sont des plus favorables à l’élevage du cheval et qu’au point de vue du sport nous sommes aussi avancés que les Anglais et les Américains. Si, profitant de l’enseignement de nos anciens, nous savons l’approprier aux exigences actuelles, il nous est facile de donner à notre élevage une direction nouvelle et de surpasser tous nos rivaux. La France peut et doit produire les meilleurs chevaux du monde comme elle produit les meilleurs vins, et non-seulement subvenir à ses propres besoins, mais fournir à ceux des autres pays et trouver dans cette industrie une source de grandes richesses qui la rendraient doublement redoutable au point de vue militaire.

Pour cela, il ne manque que quelques hommes résolus et persévérans, ayant foi dans les saines doctrines, disposés à tout diriger par eux-mêmes, à prendre de préférence comme chefs d’écurie et comme grooms, au lieu d’Anglais attachés à des pratiques routinières, de simples paysans français auxquels ils apprendront leur métier. La tâche est noble et séduisante.

Mais il faut aussi ranimer chez nous le goût du cheval. Nous joignons donc notre voix à celle de tous les maîtres illustres qui nous ont précédé, pour demander au gouvernement de favoriser le plus possible l’équitation et de relever aux yeux de tous, comme il convient, les hommes de mérite qui l’enseignent.


F. MUSANY.