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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/902

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qu’elle reconnaît et déclare nécessaire, — est juste en soi, mais que le procédé d’exécution qu’elle propose est un expédient assez misérable et d’une efficacité probablement illusoire.

M. Léon Say a proposé un moyen plus radical, une émission de rentes portant, s’il le faut, sur un capital d’un milliard, pour rembourser la totalité des livrets de 2,000 francs. Ce serait un soulagement pour tout le monde, pour la Caisse des dépôts, pour le gouvernement, pour le marché de la Bourse où les achats incessans de la Caisse ont provoqué sur la rente française une hausse, non pas factice comme on l’a dit, très substantielle au contraire, et d’autant plus dangereuse. Mais il y aurait à craindre que les fonds remboursés ne fussent immédiatement rapportés aux caisses d’épargne. D’autre part, quelle perturbation l’annonce d’un emprunt d’un milliard ne jetterait-elle pas sur le marché, alors que l’étranglement des derniers vendeurs à découvert vient de porter la rente française à 100 francs ?


V

L’auteur du rapport ne nous offre malheureusement pas de plus satisfaisantes solutions sur la question des obstacles propres à enrayer l’afflux des capitaux à la Caisse des dépôts et consigna-lions et par conséquent la formation d’un nouveau portefeuille de rentes ou de valeurs diverses venant s’ajouter à celui qui existe déjà et constitue pour l’État un si formidable péril.

Ce n’est pas que la commission n’ait point aperçu le mal, ou l’ait aperçu moindre qu’il n’est en réalité. Elle l’a clairement vu au contraire et très exactement défini.


L’extension inquiétante qu’ont prise les dépôts dans les caisses d’épargne a son origine dans la loi de 1881, qui a créé la Caisse nationale d’épargne, dite Caisse postale, qui a relevé en même temps le maximum des dépôts à 2,000 francs, et en a permis le versement en une seule fois.


À cette époque cependant, — le rapport même de M. Aynard en fait la remarque, — il n’y avait pas lieu de stimuler l’épargne, qui se développait d’elle-même de la plus large manière. Il est vrai que le Trésor avait un grand intérêt à s’assurer les ressources disponibles les plus considérables, et il lui était si commode de puiser alors dans les dépôts des caisses d’épargne ! Cette faculté lui a été fort sagement enlevée par la loi de finances de 1887.