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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/964

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« Le gouvernement, dit la lettre de notification du refus, a acquis, après un examen attentif de la situation économique actuelle, la conviction que le Portugal, une fois qu’il aurait épuisé les ressources passagères que l’emprunt lui aurait procurées, se trouverait dans l’impossibilité de remplir ses nouveaux engagemens. Dans l’intérêt du pays aussi bien que dans celui des porteurs de la rente portugaise, il faut éviter un résultat si fâcheux et sur lequel, dès à présent, on ne saurait conserver aucune illusion. »

C’est là un langage fort sensé. On a reproché au Portugal de n’avoir jamais payé depuis dix ans l’intérêt de sa dette avec ses propres ressources, mais seulement avec le produit d’emprunts extérieurs. Or la combinaison du 24 mai n’avait d’autre objet que de permettre au gouvernement de Lisbonne de payer pendant deux ans un intérêt réduit de 50 pour 100 avec le produit d’un emprunt de 100 millions.

Il y a bien quelque mérite de la part des gouvernans de Lisbonne à n’avoir pas cédé à l’appât de cet emprunt. Actuellement, il offre à ses créanciers étrangers le paiement des coupons sur le pied de 33 pour 100 en or ou le traitement de la dette intérieure, c’est-à-dire le paiement des coupons en papier, déduction faite d’un impôt de 30 pour 100.

Le comité Mézières, très mécontent du résultat infructueux de ses travaux, s’est décidé à publier toutes les pièces de la négociation. Il ne pouvait mieux faire ; sa responsabilité est dégagée, et les porteurs sont placés en face des réalités de la situation. Tout n’est pas perdu pour eux, si, comme il y a sérieusement lieu de le croire, ils ont devant eux un gouvernement honnête, résolu à faire tout le possible pour donner une satisfaction partielle, et réservant l’avenir, à leur légitime revendication.

Les valeurs turques ont légèrement fléchi après la liquidation, mais déjà se sont relevées. Le 1 pour 100, ramené à 20.10, finit à 20.67 ; la Banque ottomane est enlevée à 598.75 après avoir reculé à 585 francs. L’obligation de priorité a monté de 427.50 à 435, l’obligation des Douanes, de 470 à 480 ; l’Ottomane consolidée 4 pour 100 s’approche de 400 ; les Tabacs ottomans ont gagné 7.50 à 380. On avait annoncé une insurrection en Arménie, l’abandon des projets de conversion des obligations Douanes, le refus de la Bulgarie de payer la redevance annuelle qu’elle doit à la Porte pour la Roumélie orientale ; toutes ces rumeurs ont été démenties. Le dividende de la Banque ottomane pour l’exercice 1891 sera fixé, selon toute vraisemblance, à 17 fr. 50, soit 7 pour 100 du capital versé. Les fonds ottomans commencent à bénéficier de la ponctualité rigoureuse avec laquelle la Porte, aidée du conseil d’administration de la dette, a su, depuis dix années, satisfaire à ses engagemens.


Le directeur-gérant : CH. BULOZ.