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Ces dispositions sont très nombreuses, il suffira d’en indiquer les principales. Dans les fabriques, la journée de travail ne doit pas excéder douze heures ; elle ne peut commencer avant six heures du matin ni se prolonger après sept heures du soir ; ce qui exclut le travail de nuit ; le travail est interdit le dimanche et le samedi après deux heures au plus tard. Deux heures par jour doivent être réservées pour le repas, ce qui, en fait, réduit la journée de travail à dix heures, et le travail ne doit pas être prolongé pendant plus de quatre heures et demie sans une demi-heure de repos.

Dans les ateliers[1], les femmes peuvent travailler de six heures du matin à neuf heures du soir, sauf le samedi, où le travail doit finir à quatre heures. Mais tous les jours il doit être accordé à la femme quatre heures et demie et le samedi deux heures pour prendre ses repas. Le travail du dimanche est interdit également. Enfin le travail est absolument interdit aux femmes dans les mines.

En résumé, interdiction du travail de nuit non-seulement dans les fabriques, mais dans les ateliers. Limitation de la journée de travail à douze heures dans les fabriques, à quinze heures dans les ateliers, mais avec repos obligatoire de deux heures dans les fabriques, de quatre heures et demie dans les ateliers ; suspension du travail le samedi ; interdiction du travail le dimanche : telles sont les mesures spéciales aux femmes qu’a consacrées le Factory and workshop act, indépendamment de mesures assez strictes de salubrité et de précautions contre les accidens éventuels dont les femmes étaient appelées à bénéficier comme les hommes. C’était là une législation éminemment protectrice du travail, suivant une expression qui a cours aujourd’hui. Une vigoureuse campagne avait été conduite en Angleterre pour obtenir que les pouvoirs publics intervinssent avec ce degré de minutie (car j’ai dû passer beaucoup de dispositions de détail) dans la réglementation du travail adulte. Ceux qui ont foi dans la législation pour adoucir les misères sociales avaient le droit d’être satisfaits de leur œuvre, et après avoir obtenu des résultats aussi considérables, ils pouvaient prendre un légitime repos.

Ce repos ne devait pas être de longue durée. Il fut bientôt troublé par un cri de détresse, le plus poignant peut-être que l’Angleterre eût entendu depuis le temps où un poète populaire traduisait, dans la célèbre chanson de la Chemise, les gémissemens de

  1. La distinction entre les fabriques (factories) et les ateliers (workshops) consiste en ce que dans les fabriques il est fait usage de moteurs mécaniques.