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phénomènes météorologiques. Son action n’est point limitée aux vents et à la pression atmosphérique : elle s’étend encore aux pluies. « Ainsi, dit-il, j’ai souvent remarqué que la chute de la grêle et de la neige avait lieu au coup même de l’horloge ou au commencement d’une sonnerie annonçant quelque office… Pour moi, la cause de la condensation de la vapeur sous forme de pluie, de grêle ou de neige est la même… La cause, l’unique cause selon moi, de la condensation de la vapeur aqueuse faisant partie de l’atmosphère est la percussion de la masse aérienne à l’aide de corps sonores. Tout ce qui cause du bruit et ébranle l’air me paraît propre à provoquer cette condensation. » Voilà qui est catégorique. Le canon est la cause la plus puissante, puisque le canon de Sébastopol a fait pleuvoir à Saint-Brieuc, d’après notre auteur ; mais les cloches exercent aussi une action marquée : elles constituent même la cause la plus fréquente. À Saint-Brieuc, sur 1,744 cas de condensation de la vapeur d’eau atmosphérique, la pluie est tombée 745 fois au son de l’heure ; 562 fois au son de la demie ; 214 fois à la sonnerie des trois quarts, et 209 fois à la sonnerie du quart. Les simples coups de fusil peuvent provoquer aussi la pluie, comme doivent l’avoir remarqué les chasseurs, toujours d’après M. Le Maout ; il en est de même pour les feux d’artifice de quelque importance, comme l’assurent certains artificiers ; il en est de même aussi pour les explosions de mine dans les carrières, d’après différens observateurs ; le son du tambour, — lors de la retraite, le soir, — est souvent une cause de pluie, et même si la sonnerie de huit heures a fait pleuvoir, la retraite, à huit heures et demie, peut faire pleuvoir derechef. Un camion qui passe dans la rue mal pavée peut déterminer une ondée ; il en est de même pour de simples pétards et pour le choc du marteau qui s’abat sur l’enclume, ou de la cymbale qui se heurte contre l’autre cymbale. En somme, les nuages, le baromètre, la pluie et les mouvemens atmosphériques sont en rapport étroit avec l’activité de l’homme, avec le bruit qu’il produit, et voilà pourquoi il pleut beaucoup à Brest, où le canon tonne souvent, et lors des démonstrations navales ; voilà pourquoi il pleut beaucoup à Indret, où les forges remplacent le canon ; lors des fêtes carillonnées, les cloches tenant lieu de forges ou de canon ; lors des batailles, après les feux d’artifice ; bref, après toutes les opérations bruyantes. Voilà pourquoi il pleut si souvent sur les Parisiens et les Français en général lors des grandes fêtes, les carillons appelant les nuages et la pluie.

Voilà donc la base des théories de M. Le Maout. C’est l’homme qui, par le bruit et l’agitation de l’air, produit la pluie et la plupart des