Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 113.djvu/723

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conditions spéciales du marché ne permettent pas de prévoir le terme. La rente 3 pour 100, par exemple, est arrêtée depuis trois mois devant le cours rond de 100 francs. Elle l’a dépassé quelques jours avant le détachement du coupon trimestriel (16 septembre) atteignant 100.50. Depuis le détachement, elle oscille entre 99.75 et 99.97 ; un jour ou l’autre, elle franchira délibérément l’obstacle et s’avancera vers les cours de 101 à 102. On peut supposer, en effet, que depuis quelques semaines des capitaux, qui naguère se seraient portés vers la rente ou les valeurs similaires, se sont aventurés du côté de titres à revenu variable, en possession d’une vogue justifiée dans une certaine mesure, nous voulons parler des valeurs industrielles comme les Aciéries de France, les Forges et Aciéries du Nord et de l’Est, le Nickel, les Chargeurs-Réunis, etc. Certains de ces titres ont bénéficié en peu de temps d’une hausse énorme. Des placemens qui naguère étaient très avantageux ne le paraissent plus autant aujourd’hui ; la violence du courant qui a porté dans cette direction une partie des capitaux disponibles peut donc s’affaiblir, et de nouveau l’argent sans emploi ira grossir sans interruption le stock qui alimente les achats de rentes de la Caisse des dépôts et consignations.

Depuis que la chambre syndicale des agens de change a confié à M. Herbault les fonctions de syndic, le conflit, qui de tout temps a existé entre la coulisse et la compagnie privilégiée, mais qui restait latent, a subitement éclaté par suite d’exigences formellement énoncées du nouveau syndic. La coulisse a dû renoncer à la négociation de quelques valeurs déterminées ; il a été souvent question de lui réduire encore sa part ; une cote officielle annexe a été créée pour placer sous la protection de la compagnie l’inscription du cours d’un grand nombre de valeurs qui ne relevaient jusqu’alors que du marché en banque. Enfin, ces jours derniers, la coulisse ayant manifesté l’intention de reprendre, à partir du 3 octobre, dans le hall du Crédit lyonnais, ses réunions du soir, les syndics de toutes les compagnies d’agens de change en France ont adressé au ministère des finances une lettre collective demandant la suppression de ce marché illégal connu sous le nom de petite Bourse du soir.

Nous n’avons pas naturellement à prendre parti dans un tel débat. À première vue, il semble bien que ces réunions du soir ne soient guère utiles. Le monde financier s’en passe très bien au cours de l’été ; rien ne les rend indispensables en hiver ; les trois heures, pendant lesquelles est ouvert chaque jour le marché officiel, suffisent amplement à toutes les transactions, d’autant que la coulisse opère de son côté pendant ces trois mêmes heures. Quant aux argumens invoqués dans la lettre des syndics, on les peut trouver discutables. Les personnes qui fréquentent ces réunions du soir ou y envoient des ordres ne seraient que des « joueurs de profession, » d’où il faudrait inférer