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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 114.djvu/350

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économie, à la yankee, des lisières usitées en Europe, telles que les barrières. L’unique rue de Coquimbo, ainsi que j’ai eu l’occasion de le vérifier plus tard, est sillonnée de la sorte, dans toute sa longueur, par une voie ferrée.

Au sortir de Talcahuano, le chemin de fer effleure un coude du Biobio. C’est la plus grande rivière du Chili, qui n’en a pas de bien considérables. Il est aussi cité pour avoir été, pendant longtemps, la frontière entre les Espagnols et ces Araucans dont l’assouplissement « coûta plus de monde aux Conquistadores que toutes les autres tribus indiennes réunies. »

La campagne, fertile d’ailleurs, est loin d’être pleinement utilisée. Elle est sans grande beauté, malgré le voisinage des hautes montagnes. Au Chili et dans le reste des Cordillères, la nature est rarement séduisante ou sublime. Dans les régions les plus tourmentées, elle atteint plus facilement au lugubre qu’au grandiose.

Concepcion est une des villes importantes du Chili avec 20,000 à 25,000 habitans. Elle fut complètement détruite par le dernier tremblement de terre de 1835. Rebâties après cette dure expérience, les maisons de Concepcion sont très basses, et comme les plus anciennes comptent jus, te autant d’années qu’un individu dans la force de l’âge, les ressources architecturales et archéologiques sont nulles. — C’est une ville habituée aux accidens : dernière avant-garde des Espagnols, en vue du territoire araucanien, elle fut prise et reprise d’Espagnols à Indiens. Aujourd’hui, les Araucans sont soumis et bien soumis, et la passagère royauté d’Orélie-Antoine Ier ne les a pas affranchis de leur vassalité.

Je n’ai pu trouver une seule personne à qui le nom de notre aventureux compatriote fût connu, ce qui semble indiquer que son rôle n’eut pas l’importance que nous lui attribuons, sur sa déclaration d’ailleurs. La souveraineté de l’avoué de Périgueux a dû s’exercer sur un périmètre restreint enserrant quelques tribus.

À Concepcion, je prends mon premier tramway roulant sur la libre terre d’Amérique. Au Chili, les conducteurs sont tous des femmes. Un conducteur, une conductrice : les conductrices portent un chapeau d’uniforme, un chapeau d’homme dont la lourdeur montre que l’administration n’a pas su comprendre la part d’élégance inhérente à la mission qui lui incombait. C’est le gouvernement qui, par une louable mesure, a réservé ces emplois aux femmes. La même sollicitude se révèle à propos des télégraphes, des postes, etc.

Le soir, bon dîner, à prix très raisonnable, dans un des bons hôtels de Concepcion. Pour convives, beaucoup d’état-major. La