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À TRAVERS
LA
MACÉDOINE SLAVE


I. — EN MACÉDOINE, STROUGA.
Août 1890.

Nous touchons enfin à la Macédoine ! Cette terre des bérats, dont les évêchés mettent aux prises Serbes, Grecs et Bulgares, et dont les querelles depuis un an fatiguent l’Europe et le Turc lui-même, nous la verrons sous nos pieds tout à l’heure. Nous la rêvons comme la terre promise, depuis huit jours que, partis de Durazzo, à travers l’Albanie, nous traînons nos chevaux dans les gorges du Pinde, sous l’escorte de nos deux Albanais fidèles, Kostas le brigand chrétien et Abeddin le gendarme musulman. Ce matin, en quittant le moulin de Briniaitz, nous avons traversé dans sa largeur la vallée de Domousova, trempée de brouillards et de rosée. Le village, — notre dernier village d’Albanie, — dormait. Notre ami Janko a voulu cependant nous accompagner jusqu’aux dernières maisons : il redoute pour nous les mauvaises rencontres ; nous sommes encore en Albanie. Il nous quitte, mais il nous reverra. Il ne veut pas rester plus longtemps chez les Barbares. Il vendra son moulin après la récolte. Alors, il viendra nous retrouver en France. Si nous le voulons comme domestique, il se charge de nous mener au bout du monde.

Cette vallée de Domousova n’est qu’un bassin lacustre, mal des-