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mouvement de reprise jusqu’au cours de 100.10, atteint en moins d’une semaine. Le relevé des achats de la Caisse des dépôts et consignations pour le mois de novembre accusait l’emploi d’un capital de 32 millions pendant cette courte période. C’était autant d’enlevé au flottant du marché.

Toutefois la hausse qui venait de saluer la solution de la crise ne semblait pas pouvoir se développer ; les rachats étant terminés, le principal élément d’activité pour les transactions disparaissait. La situation politique était toujours troublée ; la place, engagée toute dans le même sens, à la merci du moindre incident. Le 12, des ventes d’origine allemande ont fait perdre brusquement à la rente une demi-unité. Un article de journal, soulevant un coin de voile sur de nouveaux scandales, causait tout cet émoi ; ce fut du moins le prétexte invoqué, et la rapidité de la réaction prouva combien la hausse avait été artificielle et restait fragile.

La journée du 13 décembre a vu se produire un mouvement de baisse plus accentué encore que celui de la veille sur la rente 3 0/0. Cette fois les motifs abondaient : vote par la chambre de la prise en considération d’un amendement au projet de loi sur les boissons, visant l’établissement d’un impôt sur les opérations de Bourse ; conflit entre le gouvernement et la commission chargée d’examiner la proposition qui confère des pouvoirs indéterminés au comité d’enquête parlementaire ; enfin démission du ministre des finances, M. Rouvier, à la suite d’articles de journaux qui, dans les journées du 12 et du 13, le mettaient directement en cause au sujet des incidens qui ont immédiatement précédé la mort du baron de Reinach.

Le 3 0/0 français a reculé dans la Bourse du 13, de 99.72 à 99.05 et s’est relevé à 99.17. L’amortissable reste à 99.20 et le 4 1/2 à 105.25. M. Tirard remplace M. Rouvier aux finances.

Il est impossible de contester que, si les cours de nos fonds publics devaient subir comme jadis l’influence de la politique, le pair de 100 francs serait trop élevé pour le titre principal de notre dette toujours grossissante. Une nouvelle crise ministérielle peut éclater du jour au lendemain ; les exigences de la commission parlementaire confondent toutes les notions de gouvernement, dénaturent tous les principes de droit et constituent un état révolutionnaire. La discussion du budget n’a pas même été abordée ; et la réforme de l’impôt des boissons, qui en est comme la préface, passe par les phases les plus extraordinaires. Elle n’est, en tout cas, pas encore votée. Les douzièmes provisoires le seront sûrement, mais on n’est pas sûr que c’est le cabinet actuel qui les proposera. Au dehors, rien assurément ne menace la paix, mais la présentation au Reichstag de la nouvelle loi militaire a provoqué, à Berlin, une sorte de crise, et l’on se demande à quelles résolutions s’arrêterait le souverain de l’Allemagne, si son