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verser à ces établissemens pour les fonds qu’ils lui confient. Le gouvernement, dont la responsabilité effective allait entrer en jeu pour la couverture du déficit à prévoir, a inséré dans la loi des douzièmes provisoires un article abaissant de 3.75 à 3.50 pour 100 le taux de l’intérêt à servir aux caisses d’épargne, et celles-ci ont dû abaisser d’autant l’intérêt qu’elles servent à leurs déposans. Cette disposition est entrée en vigueur dès le 1er janvier de cette année, et aussitôt on a vu se produire de décade en décade des excédens de retraits de fonds sur les nouveaux dépôts. Un certain nombre de déposans n’ont pas voulu se résigner à la diminution stipulée d’intérêt et ont repris une partie de leurs fonds pour en faire un autre emploi. Du 1er au 10 mars, le total des excédens de retraits s’est élevé pour les caisses d’épargne ordinaires à 131 millions, et le chiffre doit atteindre 150 millions si l’on y joint les excédens de retraits à la Caisse d’épargne postale.

La Caisse des dépôts et consignations, pour faire face à ces remboursemens, disposait des arrérages du portefeuille des caisses d’épargne et des sommes déposées en compte courant au trésor pour le compte de ces caisses, sommes s’élevant à 100 millions de francs environ. Ces ressources n’ont pas suffi, et la Caisse a dû aliéner des rentes sur le marché, pour un capital de 20 à 30 millions.

D’autre part, le trésor, obligé de restituer à la Caisse des dépôts son compte courant des caisses d’épargne, a vu son propre compte courant à la Banque de France se réduire à moins de 80 millions, alors que les disponibilités du gouvernement, représentées par ce compte à la Banque, devraient atteindre au moins 250 à 300 millions. Le ministre des finances a essayé de parer à cette situation inquiétante par une émission de bons du trésor au taux de 2 pour 100 à trois et cinq mois et de 2 1/2 pour 100 à échéance d’une année. Cette émission, portée à la connaissance du public par les seules insertions du Journal officiel et par les avis affichés dans les bureaux des trésoriers-généraux, n’a donné que de faibles résultats. Les banquiers ont pris de petites quantités de ces bons, le public sait à peine qu’il lui est possible de placer ses fonds à court terme à un taux avantageux, et le ministère des finances a été obligé de faire escompter par la Banque de France pour 55 millions de francs de ces bons.

Le rendement des impôts n’est nullement satisfaisant ; l’exercice 1892 laisse un important déficit dont le montant sera très largement dépassé en 1893, si l’on en croit les résultats des deux premiers mois qui laissent 8 millions et demi de moins-values sur les évaluations.

Les circonstances politiques et financières que nous traversons ne sont donc ni les unes ni les autres de nature à favoriser la hausse de la rente. Toutefois, avec le cours de 97.25, coté deux jours avant le détachement du coupon trimestriel, ramenant le prix du 3 pour 100 à