elles s’infiltrent dans le sous-sol, gagnent les ruisseaux, les rivières, les fleuves, qui sous cette forme entraînent à la mer des quantités formidables d’azote combiné ! Boussingault a calculé que la Seine seule emporte en vingt-quatre heures 238 tonnes de nitrate de potasse ; et, comme le débit de la Seine est infime par rapport à celui des autres fleuves du monde, on peut concevoir que l’océan reçoit constamment de prodigieuses quantités de nitrates provenant de l’oxydation des matières azotées à la surface des terres cultivées.
Si cependant on cherche à déceler les nitrates dans l’eau de la mer, on n’en trouve pas ; mais, en revanche, on y caractérise sans peine de l’ammoniaque ; elle en contient 0 milligr. 4 par litre. Le mécanisme de cette métamorphose de l’azote abandonnant l’oxygène avec lequel il est uni dans l’acide azotique pour s’unir à l’hydrogène et constituer l’ammoniaque des eaux marines n’est pas encore complètement établi ; on peut cependant supposer que les nitrates servent d’alimens aux végétaux marins, qui les réduisent et en forment des matières albuminoïdes comme le font les plantes terrestres, puis, qu’à la mort de ces plantes aquatiques les matières azotées se décomposent : l’ammoniaque serait le résidu de cette décomposition.
Quoiqu’il en soit, cette ammoniaque marine, malgré sa solubilité dans l’eau, s’exhale dans l’atmosphère, où des analyses minutieuses permettent de la retrouver. M. George Ville, puis M. Schlœsing, ont reconnu qu’en moyenne 100 mètres cubes d’air renferment un peu plus de 0 gr. 002 d’ammoniaque, unie soit à de l’acide azotique, soit surtout à de l’acide carbonique.
Peut-on trouver, dans cette faible quantité d’ammoniaque aérienne, l’origine du gain d’azote constaté dans les cultures de M. George Ville, dans les prairies, dans les forêts ? Les eaux de la pluie en amènent-elles des proportions un peu plus fortes ? L’étincelle électrique qui, nous le savons depuis Cavendish, détermine l’union des deux élémens de l’air, est-elle une autre source d’azote combiné présentant quelque importance ? Ces causes réunies vont-elles enfin nous expliquer les gains d’azote dont nous cherchons l’origine ?
On l’a cru ; mais il a fallu abandonner cette idée, quand de nombreuses analyses d’eau de pluie, quand des expériences de culture entreprises pour savoir quelle part pouvait être faite à l’ammoniaque atmosphérique dans le développement des végétaux eurent fait voir que ces apports par les eaux météoriques étaient très faibles et tout à fait insuffisans pour compenser les pertes qui résultent de l’infiltration des eaux de drainage dans les profondeurs du sol.