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la douceur de vivre et qu’il est légitime de croire au progrès de l’humanité.

III. — L’AMIRAL JEAN DE VIENNE. L’UNIVERSITÉ DE DOLE ET LES DUCS DE BOURGOGNE.

C’est à la fin du XIVe siècle que le comté de Bourgogne commence à dépouiller son vêtement féodal, pour revêtir un costume plus moderne, c’est alors aussi qu’apparaît sa dernière dénomination, Franche-Comté, France-Comté, d’origine si incertaine, soit qu’elle ait été imaginée par ceux qui contestaient à l’empire ses droits, soit qu’on l’attribuât aux résistances des anciens comtes à l’autorité des Césars germaniques, ou à l’exemption d’impôts dont le peuple jouissait. Non moins obscure l’origine du surnom de Bourguignons salés : vient-elle du baptême qui de bonne heure les fit chrétiens, ou d’une expédition malheureuse pendant laquelle les corps de nos ancêtres furent salés dans une ville du Midi pour être renvoyés sans doute dans leur pays ? On ne sait : quoi qu’il en soit, « leur donna-t-on ce très agréable brocard duquel jusques à oires nous nous glorifions, combien que les corrompus envermisselés et mal salés s’en mocquent. »

La comtesse reine Jeanne avait, au détriment de ses autres filles, institué héritière de ses États sa fille aînée, femme du duc de Bourgogne Eudes IV ; toujours disposés à la révolte, les seigneurs comtois se liguèrent à plusieurs reprises, tantôt soutenus par le dauphin et le comte de Flandre, tantôt par l’archevêque de Besançon qui prétendait supprimer l’atelier monétaire que le comte-duc avait établi à Auxonne, tantôt par l’Angleterre. Battus en 1336, en 1345, Jean de Chalon-Arlay, petit-fils du lieutenant de Rodolphe, le comte de Montbéliard, les Montfaucon, les Neuchâtel-Comté prirent leur revanche après la bataille de Crécy. Philippe de Rouvres succéda à Eudes IV (1349), sous la tutelle de sa mère, Jeanne de Boulogne qui, pour se ménager un protecteur, épousa Jean le Bon, héritier du trône de France ; mais la bataille de Poitiers entraîna l’invasion de la Bourgogne et de la Comté par les Anglais, et, le traité de Poitiers ayant rendu inutiles les bandes de routiers qui secondaient les troupes régulières, ces malandrins s’organisèrent en grandes compagnies, exercèrent d’atroces brigandages sur la plus large échelle ; ils battirent une petite armée française, tentèrent de surprendre Besançon, Salins, incendièrent Lons-le-Saunier, et, défaits enfin par Jean de Vienne[1] à

  1. Jean de Vienne, amiral de France, 1341-1396, par le marquis Terrier de Loray, in-8. — Léonce Pingaud, l’Amiral Jean de Vienne (Annales franc-comtoises), 1809.