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développe une somme de chaleur considérable. Or toute cette chaleur ne se dissipe pas pendant la nitrification, une partie est utilisée à la réduction de l’acide carbonique, et le carbone provenant de cette réduction sert à la constitution des nouvelles cellules de nitromonade.

M. Winogradsky a reconnu, en outre, que la transformation de l’ammoniaque en acide nitrique comporte deux étapes successives. La nitromonade que nous venons de décrire ne donne que de l’acide nitreux, c’est-à-dire la combinaison acide la moins chargée d’oxygène que puisse fournir l’azote.

La transformation de l’azote est complétée par un autre organisme tout différent de la nitromonade ; le ferment qui porte l’oxygène sur l’acide nitreux pour l’amener à l’état d’acide nitrique est formé de petits bâtonnets de forme anguleuse, irrégulière, n’exerçant que sa fonction spéciale de suroxydation, mais tout à fait incapable de provoquer l’oxydation de l’ammoniaque ; il y a là une division du travail des plus intéressantes.

Quand on obtient dans un milieu de culture approprié des nitrates, c’est que ce milieu renferme deux micro-organismes différens, la nitromonade transformant l’ammoniaque en acide nitreux, les bâtonnets transformant à leur tour l’acide nitreux en acide nitrique.

Dans les sols cultivés, ils sont habituellement réunis, et c’est sous forme de nitrates que l’azote combiné est utilisé par les végétaux. Ainsi que nous l’avons dit déjà à plusieurs reprises dans le cours de cet article, les nitrates exercent sur leur croissance une influence tellement décisive que les cultivateurs n’hésitent pas à s’imposer de lourdes dépenses pour se les procurer et que 500,000 tonnes de nitrates sont introduites chaque année en Europe.

Ces engrais viennent s’ajouter aux nitrates qui se produisent spontanément dans nos sols quand les conditions favorables à la nutrification y sont réalisées.

Étudions donc minutieusement, les unes après les autres, ces conditions ; nous serons récompensés de notre effort par la certitude que cette étude va nous donner des notions précises sur la fertilité des terres arables.

Ces conditions sont nombreuses, toutes doivent être remplies pour que la nitrification se produise ; et, tout d’abord, il faut que le sol renferme la matière azotée à transformer. Or, dans les terres qui ne reçoivent pas d’engrais, cette matière est l’humus qui doit, à la résistance qu’il présente à l’action des fermens, son abondance dans la plupart des terres ; cette résistance est telle que très souvent la quantité de nitrates formée en temps utile, par l’action qu’exercent les fermens, n’est capable d’alimenter que de faibles