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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 118.djvu/319

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Casasus l’attribue à ce que les prix en argent du café, comme de toutes les marchandises qui ont un débouché dans les pays à circulation d’or, se seraient élevés en proportion de la dépréciation du métal blanc. C’est possible ; mais le grand développement de la consommation du café en Europe et aux États-Unis nous paraît expliquer suffisamment sa hausse.

Les profits à retirer de l’exploitation du caféier ont appelé l’attention des capitalistes. Des compagnies américaines et anglaises, des compagnies françaises même se sont formées pour acheter des terrains propres à sa culture. D’après le Bulletin de la Société des études coloniales, les dépenses d’une plantation de deux cent mille pieds de caféiers sur 100 hectares, y compris l’intérêt du capital pendant trois années, se montent à 148,818 francs. Elle doit donner la 3e année 60,000 francs ; la 4e 111,000 francs ; la 58 165,000 francs ; la 6e 225,000 francs et pendant plus de trente ans, elle continuera à donner un bénéfice net de 150 pour 100 du capital engagé. Dans ce devis, la terre n’est comptée qu’à raison de 2 piastres l’hectare (7 francs au change de 3 Ir. 50). On peut trouver encore des terres à ce prix dans les parties du pays les plus reculées. Mais là où des compagnies américaines ont déjà commencé leurs opérations et dans le voisinage des chemins de fer, les terres à café ont atteint des prix exorbitans. Il s’en est vendu jusqu’à 3,500 francs l’hectare aux environs d’Orizaba. Ceci n’est pas pour décourager ceux de nos compatriotes qui voudraient se lancer dans des entreprises que nous croyons très lucratives ; le tout est de choisir judicieusement son emplacement et de ne pas prendre la suite d’affaires déjà fortement majorées.


II

Pourquoi les milliers d’immigrans qui quittent chaque année le vieux monde ne se hâtent-ils pas de s’établir dans ce merveilleux pays que les transatlantiques mettent maintenant à vingt jours à peine des ports de France et d’Italie ? S’ils ne le font pas, c’est qu’ils ont à compter à la fois avec le climat, avec les populations qui occupent le sol et enfin avec la constitution de la propriété.

Les terres chaudes sont non-seulement exposées aux épidémies de vomito negro ; mais encore le travail manuel y est à peu près impossible pour l’Européen. Les aborigènes même n’ont jamais pu s’y livrer aux rudes labeurs qu’exige la civilisation occidentale. Les Espagnols y avaient transporté comme esclaves des noirs d’Afrique qui y ont fait souche ; mais, une fois libres, leurs descendans, d’ailleurs très mélangés avec les Indiens, se refusent à un