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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 119.djvu/567

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LA CHIMIE DANS L’ANTIQUITÉ.

les manuscrits ne sont pas identiques, quoique ce soient d’ordinaire des solutions alcalines, acides, sulfureuses, arsenicales, fort compliquées. Mais on était fort éloigné à cette époque de la notion claire et précise de nos liqueurs acides ou alcalines modernes et bien définies.

Voici le tableau général des connaissances chimiques d’alors, d’après les documens exacts qui viennent d’être énumérés :

Dans l’ordre des arts industriels et de la médecine : extraction et purification des produits naturels utilisés, minéraux, résines, huiles, baumes, matières colorantes, etc.

Dans l’ordre de la métallurgie : fusion, coulée, alliage, moulage et travail des métaux, tant pour l’orfèvrerie que pour la construction des armes, des outils et des machines ; purification de l’or et de l’argent, par coupellation et par cémentation avec le soufre, les sulfures d’arsenic, d’antimoine, les sels de fer et les sels alcalins ; réaction des métaux sur les composés sulfurés, arsenicaux, antimoniés, mercuriels, en vue de la prétendue transmutation.

Dans l’ordre des fabrications chimiques : préparation des oxydes de plomb (minium, litharge), de cuivre, de fer (ocres, sanguine, etc.), de la céruse, du vert-de-gris, du cinabre, de l’acide arsénieux, des chlorures de mercure ; préparation des métaux en poudre et en feuilles, ainsi que des couleurs minérales et végétales pour les peintres, les miniaturistes, les verriers, les mosaïstes, les céramistes ; enfin teinture des peaux et des étoffes.

Tout cela était déjà connu en gros des chimistes anciens ; mais les préparations avaient été perfectionnées par la pratique dans le cours des siècles. La production des sels, aluns, vitriols, fondans, s’était également développée, et on en définissait avec plus de précision les différentes espèces. Le salpêtre principalement, matière inconnue des anciens, ou plutôt non distinguée par eux, commençait à être fabriqué sur une grande échelle pour les arts de la guerre. La distillation, découverte par les Grecs, s’était répandue, sans changement notable dans les appareils, mais avec un développement sans cesse croissant dans les applications, telles que l’extraction de l’eau de roses et des eaux volatiles, celle des essences de térébenthine et de genièvre, etc. : l’alcool faisait à ce moment son apparition sous le nom « d’eau ardente, » qui s’appliquait aussi aux essences précédentes. Parmi les eaux divines ou eaux-fortes, un certain nombre représentaient des produits distillés, par exemple, les esprits tirés des vitriols au moyen de mélanges de matières multiples qui donnaient naissance à des liqueurs également complexes.