Telle parla Kypris, et, grâce à son amour,
Tu renais, et tu meurs, et renais tour à tour,
Et tu rends, chaque année, à la terre ravie,
L’azur du ciel, les fleurs, la lumière et la vie.
Sur la couche d’ivoire où nous te contemplons
Éveille-toi toujours, Éphèhe aux cheveux blonds !
Meute du noir Érèbe, ô vieilles Érinnyes,
Aux yeux caves où sont des éclairs aveuglans,
Qui d’un blême haillon serrez vos maigres flancs,
Et, l’oreille tendue au cri des agonies,
Aboyez sans relâche aux meurtriers sanglans !
Filles de l’Invisible, Hôtesses des Cavernes
Où jamais n’est entrée une lueur du jour,
Dont, éternellement, Styx fait neuf fois le tour,
Tandis que, sur la fange et le long des Eaux ternes,
Foule vaine, les Morts fourmillent sans retour ;
Vous qui courez, volez, rapides et subtiles,
Emplissant de terreur l’antique Obscurité,
Secouant, dans la nuit, sous un ciel empesté,
Vos sinistres cheveux hérissés de reptiles
Qui mordent, furieux, le cœur épouvanté,
Ne nous fascinez plus de vos faces livides !
Nous avons expié, que tout soit accompli !
Fuyez l’Hadès dans l’Ombre horrible enseveli,
Venez ! exaucez-nous, ô bonnes Euménides,
Et rendez-nous la paix, le pardon et l’oubli.