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M. GLADSTONE
ET
LA CHAMBRE DES LORDS


I

C’est le 1er septembre, à une heure moins dix du matin, qu’a pris fin le long, le stérile, l’insipide et désastreux débat sur le home rule bill de M. Gladstone dans la Chambre des communes. Les statisticiens, qui ont quelquefois de l’esprit, ont calculé que, pendant les soixante et une séances qui ont précédé, dans le Sénat américain, le rappel de la loi Sherman, il s’est dit vingt millions de mots. D’après cela je suppose qu’au cours des quatre-vingt-deux soirées, consacrées par la Chambre des communes à la discussion du home rule, environ trente millions de paroles ont dû passer par le gosier des orateurs. Trente millions de paroles perdues ! Dans la quantité, il y en a eu d’amères et d’irritantes ; il y en a eu de stupides ; il y en a eu de spirituelles, d’honnêtes et de judicieuses, dans les deux sens : toutes ont été vaines. Il n’en reste plus que l’écho confus d’un long tumulte, qui s’affaiblit en s’éloignant. Il reste aussi le souvenir d’un triste pugilat qui tendrait à créer de nouvelles traditions et à faire de la vénérable enceinte du parlement quelque chose comme la « boîte aux gifles » dont les Genevois conservent la retentissante mémoire. Enfin il reste un vote par lequel une pauvre majorité de trente-quatre voix, facile à changer en minorité si l’on ne comptait que les voix anglaises,