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difficile. Elle est d’autant plus intéressante qu’il s’agit d’un phénomène unique, d’un régime que l’Inde seule a connu. La solution en mérite donc quelque effort.

Cette solution a pris aujourd’hui plus de prix que jamais ; elle est devenue aussi moins malaisée. La parenté constatée entre les langues indo-européennes a singulièrement rapproché de nous et recommandé à notre curiosité les conquérans Aryens de l’Inde. L’affinité qui s’est révélée peu à peu, non seulement dans les traditions religieuses, mais dans les élémens de l’organisation sociale, a resserré ces liens. N’a-t-on point parfois, de cette communauté de langue et de coutumes, tiré trop aisément sur la communauté du sang des conclusions trop absolues ? A coup sûr, l’origine commune des institutions qui, après avoir dominé le passé de nos ancêtres lointains, retentissent encore dans notre présent, prête pour nous aux évolutions qu’elles ont traversées, dans des circonstances et dans des milieux très différens, un intérêt singulier et, si j’ose ainsi dire, une saveur assez rare.

On a d’abord comparé les institutions chez des races dont leurs idiomes attestaient la parenté. La curiosité a vite débordé ce cercle, pour embrasser sans choix toutes les variétés des constitutions primitives. Je ne décide pas si l’étude n’a point perdu parfois en sûreté ce qu’elle gagnait en étendue. Même téméraires, ces reconnaissances un peu aventureuses dans l’illimité n’ont point été sans fruit. L’observation s’y est formée, le regard s’y est affiné, au grand profit des recherches plus timides ou, si l’on veut, plus prudentes. Pendant ce temps les documens s’accumulaient ; nous avons pris de l’état des choses dans l’Inde une connaissance plus complète et plus précise. Les publications officielles du gouvernement vice-royal jouissent d’une juste renommée. Nombre de rapports fon dés sur les derniers recensemens joignent à des données statistiques qui sont fort précieuses, des remarques, de véritables mémoires qui ne le sont pas moins. Nous recevons plus de lumière à l’heure où nous devenons plus capables d’en profiter.

Les habiles travaux de MM. Nesfield et Ibbetson sur les Provinces du nord-ouest et le Penjab se sont complétés récemment par les recherches de M. Risley sur les Tribus et les Castes du Bengale. Poursuivies avec tout le luxe des procédés propres à l’anthropologie, elles ont abouti en dernier lieu à un vaste Glossaire ethnographique. Avec un nombre infini de faits, l’auteur y a condensé ses vues d’ensemble. On peut juger avec quelles précautions, au prix de quels efforts combinés, ses élémens d’information ont été réunis et contrôlés. S’inspirant d’une foi légitime dans son vaste labeur, il a fait à la critique technique un appel pressant. Je ne me flatte nullement d’y répondre ici. Je voudrais