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— Il est bon à connoistre :
Il est de blanc armé,
Il porte la croix blanche,
Les esperonz dorez,
Et au bout de sa lance,
Un fer d’argent doré.
— Ne plorez plus, la belle,
Car il est trespassé ;
Il est mort en Bretagne,
Les Bretons l’ont tué.
J’ai vu faire sa fosse
L’orée d’un vert pré…

Mais, tandis que nous nous attardons à ce gentil recueil, combien d’œuvres encore, publiées par la Société, attendent d’être mentionnées ! C’est le Débat des hérauts d’armes où, devant Prudence, prise pour arbitre, un héraut, avec la courtoisie professionnelle, revendique la précellence de la France, dit sa plaisance, sa vaillance, sa richesse, et quelles raisons, aux jours les plus tristes de son histoire, un Français trouvait pour aimer la patrie : — ce sont les Deux rédactions en prose du roman des Sept Sages, si importantes pour étudier l’exode de ce recueil oriental de contes plaisans ; — c’est la Chronique du Mont Saint-Michel qui, à vrai dire, eût mieux trouvé sa place parmi les publications de la Société de l’Histoire de France, de même que le Saint voyage du seigneur d’Anglure à Jérusalem ferait meilleure figure parmi celles de la Société de l’Orient latin. — C’est encore le court traité des Quatre Ages de l’homme, par Philippe de Novare. L’auteur n’est pas un moine qui compile, du fond de son couvent, des lieux communs de morale, mais un vieux chevalier qui a vécu dans le siècle, parmi les familles françaises d’outre-mer. Chancelier de Chypre, après avoir rédigé, en bon jurisconsulte, les Assises de Jérusalem, il enseigne en ce petit livre, avec une biendisance naturelle, les vertus de prud’homie, de débonnaireté, de largesse. Nul ne nous instruit mieux de la morale spéciale du XIIIe siècle. C’est une noble forme de vie, « amesurée », sans nulle outrance, et que durent réaliser, en effet, les meilleurs parmi les contemporains de saint Louis, Joinville, Geoffroy de Sargines, Philippe de Beaumanoir. — On aimerait s’arrêter à toutes ces œuvres ; mais mieux vaut peut-être nous en taire que d’en parler trop brièvement…


III

À la fin de cette revue hâtive, qui n’en voit l’insuffisance ? Certes, il était bon de classer ainsi, par périodes et par genres, ces œuvres qui semblaient d’abord disparates et qui, si aisément, se groupent,