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qui produisent les maladies des pays chauds, ainsi que d’une vaccination appropriée, pour permettre aux blancs d’habiter des pays jusque-là inhabitables pour eux. En outre, s’ils arrivent à une extension lente et progressive de leur race, s’ils font « la tache d’huile », ils pourront acquérir des immunités analogues à celles que la race nègre a acquises. La manière tout opposée dont les noirs et les blancs supportent, les uns les fièvres miasmatiques, les autres la phtisie, en est la preuve. Vaccinés contre les fièvres, les noirs ne le sont pas contre la phtisie, qui fait chez eux de bien plus grands ravages qu’ailleurs. Il est donc probable que la race blanche, avec les progrès incessans de la médecine et de l’hygiène, pourra s’acclimater bien loin en dehors de sa zone habituelle.

On a aussi montré dans la religion musulmane un des moyens de conquérir à la civilisation le continent noir. La polygamie musulmane permet d’hybrider les populations indigènes avec très peu d’immigrans ; or la loi du « retour au type, » — une des grandes lois de l’hérédité, qui fait que la race croisée avec les hybrides les plus voisins les absorbe rapidement, — peut donner le moyen de ramener au type blanc les hybrides acclimatés des premiers colons. Quoi qu’il en soit, il est probable que la science trouvera des ressources pour étendre au loin la race blanche. Si on n’aboutit qu’à acclimater une race plus ou moins mêlée, il en résultera simplement ce fait que les régions trop chaudes demeureront l’apanage d’une humanité plus médiocre, mais cependant civilisée et progressive, tandis que les régions tempérées auront en partage l’aristocratie directrice de l’humanité entière. Au Cap, il y a cinquante ans à peine, les Basoutos étaient plongés dans la plus complète sauvagerie ; maintenant, ils ont des milliers de charrues, leur pays est admirablement cultivé et arrose ; leur instruction moyenne est supérieure à celle de mainte population européenne ; et, dans les examens, nombre de Basoutos réussissent beaucoup mieux que les élèves de la race blanche. Faut-il s’en plaindre ? De même, dans les États esclavagistes de l’Union. Avant la guerre de Sécession, la loi punissait d’une amende élevée et de cinquante coups de fouet l’enseignement de la lecture aux nègres. Aujourd’hui, ces mêmes nègres ont établi vingt-quatre mille écoles, qui comptent un million et demi d’élèves, près du cinquième de la population. Ces Africains méprisés ont fait, en vingt-cinq ans, ce que bien des nations européennes sont encore loin d’avoir réalisé. Faut-il donc rétablir les coups de fouet, pour la plus grande gloire de la race supérieure ?

Au point de vue économique, il sera possible de se défendre. Les Chinois s’étaient entourés d’une muraille ; nous y avons fait