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particulier, auquel elle tenait beaucoup. Pour le célébrer, la ville élisait des flammes, et quand ils sortaient de charge, on leur en laissait le titre, afin que l’éclat des fonctions qu’ils avaient une fois remplies éclairât toute leur vie. C’est au moins ainsi qu’on explique d’ordinaire la présence de trente-cinq flamines perpetui sur les listes des dédirions de Timgad : ils y sont placés immédiatement après les duumvirs, les premiers magistrats de la cité, et avant les pontifes et les augures ; ce qui montre l’estime qu’on faisait de cette dignité, et qu’on la mettait au-dessus des autres sacerdoces. La ville, ayant été fondée par un empereur, avait des raisons particulières pour être dévouée à l’Empire ; elle était fière de son origine, reconnaissante des faveurs qu’elle avait reçues, et très disposée à témoigner son dévouement au prince. Aussi peut-on croire que les fêtes impériales étaient, à Timgad, les plus belles de toutes. Il est facile de se figurer, quand on les célébrait, le concours de tous les citoyens, se pressant sous les portiques, contre les statues, sur les marches des édifices, les magistrats de la ville s’avançant gravement, avec leurs faisceaux et leurs licteurs, comme s’ils étaient des sénateurs de Rome, les prêtres vêtus de la robe bordée de pourpre, couronnés de fleurs, tandis que, devant eux, des jeunes gens choisis portaient, sur des piques, les bustes en bronze doré des empereurs déifiés, et tous se dirigeant, au milieu des acclamations de la foule, vers le temple des Divi, où devaient se faire les sacrifices. C’est ce jour-là qu’il aurait fallu voir le Forum de Thamugadi.


III

Le Forum est la plus grande curiosité de Timgad, mais ce n’est pas la seule. On a déblayé d’autres édifices qui, sans avoir la même importance, n’en sont pas moins fort intéressans à connaître ; il faut nous remettre en route pour les visiter.

Reprenons la rue par laquelle nous sommes venus, et repassons sous l’arc de triomphe. À notre gauche, nous rencontrons un édifice rectangulaire terminé par une exèdre qui était sans doute la base d’une abside. Comme cette forme est ordinairement celle des basiliques, nous sommes d’abord disposés à lui en donner le nom ; mais il faut se rendre à l’évidence : une inscription nous en apprend la destination réelle, que nous n’aurions peut-être pas devinée du premier coup. C’est un marché, qui, comme la plupart des autres monumens de Timgad, provient de la munificence d’un riche citoyen. Plotius Faustus, après avoir commandé des cohortes et des ailes de l’armée auxiliaire, et mérité le titre