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IV

La caste est le cadre de toute l’organisation brâhmanique. C’est pour venir au brâhmanisme que les populations aborigènes se constituent en castes, acceptent les règles strictes de la caste. Le fait n’est sûrement pas nouveau. Or, le brâhmanisme a pu se charger d’élémens étrangers, il a pu, au cours de l’histoire, subir des influences extérieures ; il reste en somme dans l’Inde le représentant de la tradition aryenne. Sans exclure en aucune façon l’éventualité d’actions secondaires, nous sommes autorisés à chercher d’abord des sources aryennes à une institution qui nous apparaît si étroitement fondue avec la doctrine et la vie brâhmaniques.

L’histoire des vieilles sociétés aryennes repose sur l’évolution, variable suivant les lieux, de l’antique constitution familiale, telle que la comparaison des traits épars dans les diverses branches de la race permet d’en deviner la physionomie. Par la notion de parenté qui la pénètre, par la juridiction qui y règle assez tyranniquement la vie privée, mariage, nourriture, usages cérémoniels, par la pratique habituelle de certains cultes particuliers, par son organisation corporative, la caste rappelle en effet le groupe familial tel qu’on l’entrevoit à ses degrés divers, dans la famille, la gens, la tribu. Ses traits originaux ne sont pas moins accusés. Il n’en est guère pourtant dont, en y regardant de près, on n’aperçoive le germe dans ce passé, encore que les élémens communs ne se soient pas ailleurs développés dans la même ligne ni également étendus. C’est au fond le même phénomène dont l’Inde nous donne bien d’autres exemples. En presque toutes les matières qui provoquent la comparaison avec les rameaux congénères de la souche aryenne, nous nous y heurtons tout ensemble à des coïncidences minutieuses et à des divergences profondes. La parenté perce jusque dans des élémens qui, évidemment, ont été coulés ici en un moule nouveau.

Des règles qui contrôlent le mariage dans la caste, les lois exogamiques qui excluent toute union entre gens relevant d’une même section, gotras ou clans de diverses sortes, se signalent par leur rigueur. Elles ont, dans toutes les sociétés primitives, exercé un large empire. Il s’atténua promptement dans les milieux où fleurit une constitution politique plus savante. Le principe en fut certainement familier à la race aryenne comme à d’autres. Au témoignage de Plutarque, les Romains, dans la période ancienne, n’épousaient jamais de femmes de leur sang. Parmi les matrones