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s’est jamais souciée que de religion et de science. Le quartier élégant est rempli de très jolies maisons bourgeoises, la plupart en bois peint, mais, affectant tous les styles ; des marges de gazon les encadrent : on les dirait dispersées sur une pelouse. La ville entière est scrupuleusement propre, avec ces sidewalks, fort laids d’ailleurs, qui partout en Amérique, sur les routes, dans les parcs publics, autour des maisons permettent d’éviter la poussière ou la boue, selon la saison. Quelques rues ont un pavage en brique perfectionné. Les intérieurs, entrevus derrière les bow-Windows garnis de fleurs, sont d’une agréable intimité. Nous atteignons un faubourg formé de maisonnettes peintes en couleurs claires, bien vernies, semblables à des jouets tout neufs : c’est le quartier suédois. Ces bravos gens forment une partie assez importante de la population et s’enrichissent vite par leur industrie.

Vaste terrain de manœuvres pour les trois compagnies que commande un officier de l’armée des États-Unis délégué comme professeur de science et de tactique militaire. Le service est obligatoire, chaque étudiant étant tenu de se procurer un uniforme.

Eglises nombreuses, qui représentent toutes les sectes protestantes, et aussi, à l’état de minime fraction, le culte catholique. Ce sont les efforts et les sacrifices des deux églises congrégationaliste et presbytérienne qui ont fondé le collège : leur influence domine donc dans son conseil d’administration, mais sans aucune étroitesse. Un véritable esprit chrétien est seul exigé comme base fondamentale et indispensable de l’éducation à Knox ; les étudians doivent fréquenter le dimanche leurs églises respectives.


J’assiste à la classe de latin, faite par une jeune fille au visage expressif et résolu, qui paraît exercer sur ses élèves un grand ascendant : il y a autour d’elle à peu près autant de garçons que de filles. Quoique aucun règlement ne l’exige, les deux sexes se séparent et occupent chacun l’un des côtés de la chambre : les filles sont généralement plus avancées ; elles sourient avec un peu de malice à chaque bévue des garçons, qui eux non plus ne paraissent pas fâchés de les prendre en faute ; aucune coquetterie d’un côté, aucune galanterie de l’autre. Je remarque le teint hâlé, la mine rustique de plusieurs des étudians, des hommes faits ; leurs bonnes figures expriment à la fois l’énergie et la candeur ; on m’apprend qu’ils viennent de parties reculées de l’Ouest et qu’avant d’entrer au collège ils ont gagné l’argent nécessaire en travaillant de leurs mains. Le directeur d’un important magazine ne disait-il pas un jour, en voyageant avec moi : — « Toute cette campagne, je l’ai parcourue autrefois à pied, un ballot de