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Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 126.djvu/786

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Marne. Mais, dans l’hypothèse la plus probable, sa prochaine campagne devait être à la fois offensive et défensive. La mise en état de défense des places n’était donc ni moins nécessaire, ni moins urgente que la réorganisation de l’armée. Dès le 27 mars, l’Empereur donna des ordres pour ces travaux qui furent entrepris seulement du 15 au 25 avril. On avait dû attendre les rapports sur l’état des places, les instructions du comité du génie, l’ouverture des crédits, la formation des ateliers. A Metz on employa 700 ouvriers par jour, à Rocroi 500, à Tout 700, à Landrecies 400, à Dunkerque 1 000, à Huningue 500, à Grenoble 400, à Cherbourg 500, à Bayonne 400, à Bordeaux 200, à Perpignan 150, au camp retranché de Maubeuge 1 000. Le 15 juin, les défilés des Vosges et les passages de l’Argonne étaient pourvus de redoutes, d’abatis, de palanques; on se tenait prêt à tendre, au premier ordre, les inondations du Nord, et, dans plus de 80 villes, les travaux étaient ou complètement terminés ou en voie de prompt achèvement. Au reste, dans presque toutes les places il n’existait pas de brèches aux remparts. Il avait fallu seulement relever les talus de contrescarpe, disposer les plates-formes pour les barbettes, réparer les embrasures, les banquettes, les glacis et établir les défenses accessoires et quelques ouvrages extérieurs.

Lyon et Paris exigeaient des travaux tout autrement considérables. A Lyon, 4 000 ouvriers furent embauchés. On répara la vieille enceinte de Fourvières, ainsi que celle qui joignait le Rhône à la Saône; on éleva des têtes de pont à la Guillotière et aux Brotteaux, des redoutes à Pierre-Scise, à Saint-Jean et à la Croix-Rousse. Sans doute dans la crainte de s’aliéner les Parisiens en leur montrant le péril en face. Napoléon, si puissante que lui parût la nécessité de fortifier Paris, ne donna ses premiers ordres à cet égard que le 1er mai. C’était bien du temps perdu, d’autant plus que l’Empereur voulait un vaste système de fortification avec lignes continues, ouvrages à cornes et à couronnes, redoutes et forts croisant leurs feux. Les généraux Haxo et Rogniat firent le tracé. Ce fut seulement vers le milieu de mai que les travaux entrèrent en pleine activité. 1 500 puis 2 000 puis 4 000 ouvriers y furent employés, sans compter les nombreux détachemens de volontaires de la garde, de la ligne, de la garde nationale et des tirailleurs fédérés. Quand Napoléon partit pour l’armée, les retranchemens et les ouvrages de la rive droite, commencés les premiers comme devant couvrir les points d’attaque les plus probables, se trouvaient en partie achevés, mais ceux de la rive gauche étaient encore à l’ébauchement.

On mena de front les travaux de fortification et armement