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en supprimant cette obligation. Si même il s’en trouvait un assez puissant pour l’oser, le Parlement ne le lui permettrait pas. Ce serait à bref délai ébrécher un patrimoine, que nous avons l’impérieux devoir de conserver intact à nos petits-enfans !

D’ailleurs le rachat serait aujourd’hui extrêmement onéreux pour nos finances. Il ne pourrait s’opérer qu’en vertu des dispositions des actes de concession complétées par les conventions de 1883. Pour en régler le prix, on relèverait les produits nets annuels obtenus par chaque compagnie pendant les sept années qui auront précédé celle où le rachat sera effectué ; on en déduirait les résultats des deux plus faibles années et on établirait la moyenne des autres. Les compagnies pourraient en outre demander que toute ligne dont la mise en exploitation remonterait à moins de quinze ans fût évaluée, non d’après son produit net, mais d’après le prix réel de premier établissement, c’est-à-dire que pour les nouvelles lignes, qui sont naturellement les moins productives, le revenu ne servirait pas de base, et que le montant des sommes dépensées par la compagnie lui serait restitué en capital. Le produit des autres lignes, calculé comme nous l’avons dit ci-dessus, formerait le montant d’une annuité qui serait due et payée à la compagnie pendant chacune des années restant à courir sur la durée de la concession. Pour l’Est, le Midi, l’Orléans et l’Ouest, les dividendes garantis sont compris, en vertu des conventions de 1883, dans les revenus dont l’évaluation servirait de base à l’annuité. Des calculs qu’il est aisé de faire montrent que les actionnaires auraient tout à gagner au rachat. Pour l’Orléans, par exemple, 56 francs de rente que l’Etat fournirait valent au cours d’aujourd’hui (102 francs par 3 francs de rente 3 pour 100) près de 1 900 francs, alors que l’action est cotée 1 470 francs : ce serait un bénéfice de 430 francs par titre offert gratuitement aux porteurs. Le rachat assurerait d’une façon générale aux actionnaires des quatre compagnies ci-dessus désignées et du Nord, jusqu’à la fin des concessions, une rente sur l’État égale au moins aux dividendes qu’ils touchent aujourd’hui. A l’heure actuelle, le rachat consoliderait pour soixante-quatre ans en faveur des actionnaires du Lyon un revenu qui ne leur est plus garanti que pour vingt et un ans. Au contraire plusieurs de ces dividendes seraient susceptibles d’être notablement diminués au jour où cesserait la garantie. Cette vérité a commencé à se répandre assez pour que les projets tendant à cette solution soient devenus de plus en plus rares. L’initiative parlementaire elle-même, source féconde de tant de gaspillages, y semble presque avoir renoncé. La nouvelle Chambre élue en 1893 ne nous a encore apporté qu’une seule proposition de rachat de l’Orléans,