cloches » qui occupe tant de place dans le néo-christianisme d’alors. « Mes nerfs, disait-il, étaient en sympathie avec ce sentiment. » Ajoutez les onctions qui consacrent le souverain et le font lieutenant de Dieu, les pompes qui frappent l’imagination des foules et ces grands spectacles du monde, où c’est entrer dans la gloire que de paraître comme acteur. « Dès que j’ai eu le pouvoir, je me suis empressé de rétablir la religion. Je m’en servais comme de base et de racine. » Il la conçoit ainsi dès ses premières rencontres avec les évêques d’Italie. César était grand pontife et présidait aux sacrifices, Charlemagne gouvernait l’Eglise, Pierre le Grand se fit maître de la religion de son empire : ce sont des parties essentielles dans l’histoire que Bonaparte a « conquise ».
« La vraie politique, écrit-il à Talleyrand, n’est autre chose que le calcul des combinaisons et des chances. » Débrouiller, dans les affaires, les rapports qui échappent aux autres hommes ; démêler les incidens, que la politique doit gouverner, de l’allure générale qui gouverne la politique ; connaître, selon les enseignemens de Frédéric, « les principes permanens des cours, les ressorts de la politique de chaque prince, les sources des événemens, » voilà à quoi s’applique Bonaparte, ou plutôt ce qui se révèle à lui par l’intuition continue de sa pensée, excitée par la vue des choses, alimentée sans cesse par les conversations, les confidences, les mémoires écrits, les rapports qui affluent autour de lui. Il s’accommode à la politique du siècle comme les conventionnels l’ont fait, spontanément et du premier pas, lorsque les révolutions les ont jetés au pouvoir. Il lui paraît aussi naturel, avec la Révolution française, par cette Révolution et pour elle, d’envahir, conquérir, rançonner, découper, démembrer les nations, reconstituer les peuples, qu’il semblait naturel à Louis XIV de disputer, de morceler et de partager les héritages des rois. Il applique au droit public nouveau les mêmes fins d’État que les rois de France appliquaient, la veille, et que les autres souverains continuent d’appliquer à l’ancien droit public. L’ancien et le nouveau régime peuvent entrer ainsi en collusion. On a formé le premier nœud à Bâle, en stipulant l’expropriation des territoires ecclésiastiques d’Allemagne, on forme le second à Léoben, en stipulant le partage des territoires de Venise, du Saint-Siège et des princes d’Italie.
Bonaparte se représente l’Europe découpée en tranches nettes, en relief et en mouvement, mais avec des dégradations singulières