ruraux ce qu’il en coûte de venir s’établir à l’abri des murailles, et à ralentir l’émigration des campagnes vers les centres urbains.
Douanes. — Au premier rang des ressources du budget impérial figurent les douanes, dont le produit pour 1894-95 est évalué à 350 millions. Au début, c’était à peine 100 millions qui entraient de ce chef dans les caisses du Trésor. Aussi n’est-ce pas seulement au développement naturel de l’activité commerciale qu’est due cette progression, mais avant tout au changement radical survenu il y a quinze ans dans la politique douanière de l’Allemagne, changement dont M. de Bismarck fut l’auteur le plus passionné et le plus énergique. Il apporta à cette œuvre toute l’ardeur d’un néophyte, car c’est un revirement complet que subirent en 1878 ses doctrines économiques, lorsqu’il trouva son chemin de Damas, aux applaudissemens des grands industriels et propriétaires allemands. Retiré pendant dix mois sous les ombrages de Friedrichsruhe, le rude lutteur y avait consacré de longues méditations aux questions commerciales et industrielles ; quand il rompit le silence où il s’était enfermé, ce fut pour annoncer à l’Allemagne attentive sa conversion à d’autres théories ou plutôt d’autres idées (car il nie la valeur de la théorie en ces matières) que celles auxquelles il était resté jusque-là attaché : il venait tout récemment encore de leur donner un gage éclatant de fidélité en abolissant, le 1er juin 1877, les droits d’entrée sur les fers. L’invasion des fers anglais qui inondèrent alors le pays souleva un tel concert de lamentations que le chancelier ne put y rester sourd. À ce moment naquirent ses premiers doutes sur les mérites de la politique libre-échangiste qu’il suivait depuis la conclusion du traité de commerce avec la France en 1862. Le 15 décembre 1878, il adressait de Friedrichsruhe au Conseil fédéral son mémoire sur l’ensemble de la réforme, dont il résumait ainsi les tendances : 1° diminution des impôts directs et augmentation des impôts indirects ; 2° retour au principe de la taxation de toute marchandise étrangère pénétrant sur le territoire de l’Empire ; 3° maintien ou élévation des droits protecteurs ; 4° révision des tarifs de chemins de fer.
Il allègue que l’ensemble des recettes de douanes ne représentait alors en Allemagne que 2 marks 83 centièmes par tête d’habitant, tandis qu’en France il donnait 4,88, en Angleterre 12,59, aux États-Unis 16,34. Il s’appuie, pour justifier les droits de douane, sur l’ancien système prussien et prétend frapper tout, sauf les matières premières nécessaires à l’industrie que l’Allemagne ne peut produire. Les droits seront gradués d’après la valeur des marchandises et le besoin qu’en auront les habitans : l’échelle n’est guère encore que de cinq à dix pour cent de la valeur.