manifestée que par vous seul. » Il nommera à tous les emplois ; il fera disposer par des commissions, formées par lui et composées chacune de trois membres, toutes les lois relatives à la justice, à l’administration, aux finances, à l’armée, à la police, etc. Il les publiera et les fera exécuter. La dépêche se terminait, d’ailleurs comme toutes les autres, par des adulations et par un blanc-seing : « Le Directoire s’en rapporte entièrement à vous… Il est convaincu, quelle que soit l’issue, que vous aurez toujours été dirigé par votre attachement sincère à la République… Puissent nos vœux se réaliser en faveur de la liberté de cette partie de l’Italie, et vous aurez ajouté à la gloire d’un grand capitaine, la gloire non moins satisfaisante et non moins solide du bienfaiteur et du législateur d’un peuple libre. »
Le plan du Directoire s’appliquait aux Cispadans et aux Transpadans, réunis en une seule république. Mais s’arrêterait-on à cette limite ? Le Directoire rêvait d’une Italie « libre jusqu’à l’Adriatique. » On en parlait à Paris, on le disait très haut à Milan. Dans quelle mesure les Directeurs approuvaient-ils les menées révolutionnaires des agens lombards et des émissaires français qui agitaient les villes de la terre ferme ? Si la Lombardie était érigée en république avec les Légations, Venise ne serait-elle pas fatalement destinée à indemniser l’empereur ? Les Vénitiens auraient été bien aveugles et bien sourds s’ils ne s’étaient point préoccupés de ce double péril qui les menaçait, révolution ou démembrement, les deux peut-être. Leur envoyé à Paris, Querini, recueillait les bruits les plus alarmans. « Il ne se passe pas de jour, écrivait-il, au commencement d’avril, où je ne sois amaramente cruciato. » Il avait, en portefeuille, des instructions datées du 27 août 1796, qui prévoyaient cette extrémité et l’autorisaient à employer tes derniers expédiens. Il alla trouver Barras, et l’adjura d’ordonner aux généraux français de ne pas intervenir dans les affaires intérieures de la république de Venise. « Etant plus forts que vous, répondit Barras, c’est à nous de commander… La République de Venise peut perdre tous ses États d’Italie pendant notre occupation ». Querini saisit la nuance. « Il faudrait, écrivait-il le 8 avril, de 6 à 7 millions ; mais deux en numéraire suffiraient ; on fournirait le reste en obligations. » Il s’aboucha avec un des nombreux « courtiers » qui passaient pour avoir la confiance de Barras ; c’était un certain Wiscowich, Dalmate d’origine. « Le sort de Venise est dans vos mains, lui dit ce politique officieux. Le Directoire est partagé… deux de ses membres combattent les mesures révolutionnaires, deux les approuvent, le cinquième reste indécis… moyennant un subside, la solution