de rester confinée chez elle. Les circonstances du pèlerinage, le nombre des pèlerins, les ressources qu’offraient le Hedjaz et les villes saintes, étaient pour la plupart ignorés, même du monde musulman de Constantinople. Nous connaissions seulement les relations faites par Burckhardt en 1814 et plus tard par Burton, de leurs périlleux voyages. Dans ces dernières années un médecin algérien, Morsly, a accompagné à la Mecque ses coreligionnaires. Il faut citer encore, parmi les très rares Européens qui ont pu pénétrer à la Mecque, un Hollandais, le docteur Snouck Hurgronje, et un Français, Léon Roche. Roche avait été envoyé à la ville sainte par le maréchal Bugeaud. Il commença par faire une profession de foi musulmane et parvint à la Mecque au milieu de mille dangers. Dénoncé comme chrétien par des pèlerins d’Algérie, il eût été infailliblement mis à mort sans l’intervention de six nègres vigoureux, esclaves du chérif, qui, au premier soupçon, feignirent de se charger de l’exécution. Ils le bâillonnèrent, le garrottèrent, et le hissèrent chargé de liens sur un chameau qui, dans une course folle, l’emmena en sept heures à Djeddah.
Nous devons à ces courageux voyageurs les renseignemens que I on trouvera plus loin et que nous compléterons par des détails que M. Legrand, médecin sanitaire de France à Suez, a recueillis çà et là parmi les hadjis.
Le docteur Snouck Hurgronje<ref> Het Mekkaansche Feest, Leyde, 1880. < :ref> nous a donné quelques détails sur les mœurs et les habitudes de la Mecque. La justice y est rendue d’une façon tout à fait primitive. Les cadis ne jugent que les petites affaires, tandis que les grandes sont décidées par le chérif lui-même ; mais avec de l’argent on peut tout obtenir. On peut faire mettre ses ennemis en prison et en faire sortir ses amis. La superstition est très grande. Des ceintures magiques guérissent la stérilité des femmes. On lit l’avenir dans les vieux os et les écailles d’huîtres. On croit aux amulettes et aux évocations de toutes sortes. Un certain nombre de femmes passent pour être possédées par un mauvais esprit nommé zâr. Disons, à ce propos, que, d’après M. Snouck Hurgronje, c’est une erreur grave de croire que la femme musulmane soit obligée de se voiler. Le calat (service religieux) veut au contraire qu’à la mosquée la femme ait le visage découvert. L’explorateur hollandais a toujours vu avant et pendant les cérémonies religieuses des femmes ayant le visage découvert, mais toutes cachaient soigneusement leur chevelure, car l’exhibition de la moindre mèche est considérée comme un