Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 129.djvu/898

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’idée, mais toute espèce de mouvement aurait cessé sur la terre ; il n’y aurait plus d’atmosphère, plus de fleuves, plus de mers ; l’immobilité et la mort seraient partout. »

« Déterminer la distance à laquelle nous vivons habituellement de cet état si singulier, jusqu’où notre esprit peut dépouiller les corps de toute chaleur sensible, exprimer cette distance en degrés du thermomètre ordinaire, ou plutôt fixer le zéro absolu de la température, voilà un des problèmes les plus intéressans que notre curiosité puisse désirer. »

Quel est le corps dont Desormes et Clément vont déterminer le contenu absolu de chaleur ? Tous les corps ont la propriété de dissimuler, à l’état latent, des quantités plus ou moins grandes de calorique, et cette circonstance rend fort difficile la mesure de la quantité totale de chaleur qu’ils recèlent. Pour n’avoir pas à tenir compte du calorique latent, Desormes et Clément vont s’adresser au vide ; les molécules matérielles n’existant plus, on ne pourra craindre qu’une partie du calorique leur demeure combinée.

Il s’agit donc de déterminer, à chaque température, le calorique d’un espace vide d’air ; mais avant de songer à cette détermination, il est nécessaire de fixer le thermomètre auquel la température sera rapportée, car ce nombre, que l’on nomme température, n’a aucun sens si l’on ne définit l’échelle sur laquelle il est lu. C’est encore un espace vide de toute matière pondérable qui va nous servir à définir la température. Un tel espace ne renferme plus que du fluide calorifique ; il en renferme d’autant plus qu’il est plus chaud. Convenons de prendre, pour mesure de la température, un nombre proportionnel à la tension qu’acquiert le fluide calorifique dans un espace vide d’air porté à cette température ; choisissons le coefficient de proportionnalité de manière que ce nombre croisse de cent unités lorsqu’on passe du point de fusion de la glace au point d’ébullition de l’eau ; nous aurons obtenu ce que Desormes et Clément nomment la température absolue.

Mais ce thermomètre est purement abstrait ; quel est l’appareil réel qui nous fera connaître, exactement ou approximativement, les indications que donnerait cet instrument idéal ? Entre la température de la glace fondante et la température de l’eau bouillante, le nombre de degrés dont monte ou descend un thermomètre centigrade soit à air, soit à mercure, est à peu près égal, — Desormes et Clément le supposent, — au nombre de degrés dont s’élève ou s’abaisse la température absolue.

Le fluide calorifique est un fluide compressible et élastique,