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soit plus incapable de trouver, mais parce qu’il est moins hardi à chercher, d’un naturel plus tranquille et peu amoureux des grands risques. En un mot, c’est par la nature des sentimens et de la volonté, plutôt que par l’intelligence, qu’on peut ici établir des distinctions.

Le Morvandais, fort bien étudié par M. Hovelacque, peut nous fournir un bon spécimen du Celte : il est « sobre, économe, courageux, attaché à son pays, curieux, fin, d’esprit mobile sous une apparence indolente, hospitalier, obligeant sans calcul ». Les qualités et défauts de l’Auvergnat, avec son entêtement proverbial, sont bien connus. L’Auvergne, d’après sa littérature, est « inflexible et raisonneuse ». Il faut d’ailleurs, pour apprécier le caractère auvergnat, faire une part à l’influence de la vie des montagnes et aux habitudes essentiellement rustiques qui s’imposèrent aux Celtes réfugiés sur les hauteurs. Les brachycéphales ont toujours été, selon le mot de M. Topinard, « les opprimés, les victimes des dolichocéphales. » Ceux-ci, brouillons et remuans, batailleurs et pillards, les arrachaient à leurs champs et les obligeaient à les suivre en leurs folles expéditions, tantôt à Delphes, tantôt au Capitole ; les Celtes, eux, n’éprouvent pas le besoin de courir le monde, de lancer des flèches vers le ciel ou de se battre contre la mer ; ils aiment le sol de la patrie, ils sont attachés à leur famille ; ils s’inquiètent quand ils n’aperçoivent plus la fumée de leur toit, ils se créent par l’imagination un monde à eux, souvent fantastique, et y font de longs voyages sans quitter le coin de leur feu. Ils aiment mieux conter des aventures que s’y lancer. Prosaïques lorsque leur condition les y invite, ils ont cependant leur poésie rêveuse et merveilleuse ; ils croient aux fées, aux esprits, aux perpétuelles communications entre les morts et les vivans. Fidèles à la religion de leurs pères, dévoués souvent jusqu’au sacrifice, ils sont conservateurs en politique, tant qu’ils ne sont pas poussés à bout. En un mot, ils ont les qualités et les imperfections des volontés plutôt douces que violentes et plutôt routinières que révolutionnaires. Notre rude et pensive Bretagne, retirée aux confins du monde, noyée dans ses brumes océaniennes, nous offre des Celtes plus poétisés et plus susceptibles de mélancolie, avec un sentiment religieux plus intense ; peut-être ses qualités particulières sont-elles dues, comme en Irlande, comme dans le pays de Galles et en Écosse, au mélange du sang celtique avec une certaine proportion de sang kymrique blond, sous un climat humide et brumeux.

La physiologie du cerveau est encore trop peu développée pour qu’on puisse localiser sûrement les facultés intellectuelles en des