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traverser de part en part le continent africain. Un accord avec le gouvernement a remis à la Chartered l’administration et la juridiction des pays conquis au sud du Zambèze, ainsi que celle de la région située au nord de ce fleuve et désignée sous le nom de British Central Africa. Le duc de Fife termine en demandant à l’assemblée de voter des remerciemens à M. Cecil Rhodes : « Si l’on ne peut dire de lui, comme d’un illustre Américain, qu’il a fait une nation, j’affirme du moins, s’écrie le gendre du prince de Galles, qu’il restera au premier rang parmi les hommes de ce siècle, qui ont fait l’Angleterre plus grande (greater Britain). »

Lord Grey, qui prend ensuite la parole, s’exprime dans le même sens. Peu de personnes, dit-il, se rendent compte de l’étendue et de la valeur des acquisitions dues à l’heureuse combinaison de volonté, d’imagination et d’autorité qui distingue MM. Rhodes et Jameson. Les deux provinces de Mashonaland et Matabeleland compteront bientôt parmi les colonies anglaises les plus riches et les plus prospères : elles donneront à une foule de nos nationaux des terres fertiles, des emplois avantageux et ouvriront de vastes marchés aux fabricans du Royaume-Uni. « Rhodes a fait plus, dit lord Grey, qu’ajouter deux provinces a notre empire : par son influence et par son exemple, il a redonné une âme et un cœur à l’Angleterre, au moment où quelques-uns d’entre nous se demandaient si son ancienne flamme ne s’était pas éteinte. »

M. Rhodes, se levant à son tour, remercie l’auditoire et lui déclare que, connaissant l’esprit pratique des Anglais, il traitera le côté pratique des développemens de la Chartered. «Nous avons la terre et les mines dans tout le nord du Zambèze, sauf dans le protectorat du Nyassaland : et encore y avons-nous obtenu de nombreuses concessions minières, en même temps que le gouvernement reprenait à sa charge les frais d’administration de ce protectorat. La Chartered possède le sol et le sous-sol depuis Mafeking jusqu’à Tanganyika, sur une longueur d’à peu près 2 000 kilomètres et une largeur de plus de 800 kilomètres. Le budget s’équilibre, à 500 000 francs près, que le développement naturel des recettes de la Compagnie ne devra pas tarder à lui fournir. Quant aux mines, elles constituent toujours un risque ; mais il serait surprenant que, sur cette immensité de territoire, où tant de filons sont reconnus, il n’y en eût pas de rémunérateurs. » L’orateur parle ensuite de la situation politique de l’entreprise, de ses bons rapports avec les Portugais ; il veut bien rappeler que Henri-le-Navigateur était de sang anglais et déclare professer le plus grand respect pour ce peuple, qui a le premier