la foi à leur existence. Ce point mérite d’autant plus d’être examiné qu’Euripide était évidemment préoccupé de l’intéressante tentative faite au VIe siècle et continuée de son temps pour établir, à côté de la religion populaire, une autre religion plus propre à satisfaire chez les fidèles le désir de pureté et de sainteté. On peut se demander si, de même qu’Eschyle s’était inspiré, jusqu’à un certain point, des mystères d’Éleusis. Euripide ne subit pas l’influence de l’orphisme.
L’orphisme, à travers les obscurités dont il reste enveloppé pour nous, apparaît comme une œuvre singulière de foi et de calcul. Constitué principalement par le faussaire Onomacrite, qui fut chassé d’Athènes pour avoir falsifié un oracle, il s’inspire d’un désir pieux de réforme religieuse et morale. Ayant d’antiques racines dans les conceptions religieuses de la Phrygie et de l’Orient, il cherche sa s’introduire dans la religion populaire de la Grèce en se rattachant à la théogonie d’Hésiode, qu’il ramène à l’unité par un syncrétisme hardi et rempli d’allégories et de symboles. C’est ainsi qu’il compose des cosmogonies, qu’il prétend consacrer par les noms légendaires d’Orphée et de Musée. En même temps i à une doctrine de la transmigration et de la purification des âmes qui paraît inspirer ses mystères, et il semble qu’il n’est pas étranger au mouvement qui, par l’introduction d’Iacchos, représentant de l’âme humaine, détermina le développement des saints mystères d’Éleusis. La vie orphique, à laquelle se vouent ses initiés, leur impose par ses minutieuses prescriptions l’extérieur et la pratique de la pureté ; et par là, comme par certaines parties de sa doctrine, l’orphisme confine au pythagorisme. Il y touche même de si près, qu’un certain nombre des premiers Pythagoriciens sont des Orphiques.
C’est donc une intéressante et grande chose que cette création complexe de l’orphisme. Il exerça une réelle influence, il obtint assez de succès pour que ses poèmes, comme l’atteste l’Ion de Platon, fussent admis à l’honneur des récitations publiques ; et ses conceptions sur le monde, sur la double nature morale de l’homme et sur la destinée, après avoir attiré l’attention de Platon, occupèrent encore les néo platoniciens. Cependant il ne semble pas que l’orphisme ait réussi à pénétrer bien avant dans l’esprit de la foule. Sa théogonie, avec ses allégories et ses combinaisons, paraissait froide à côté de celle d’Hésiode, dont la naïve grandeur s’était emparée des imaginations, où les Grecs voyaient, réelle et vivante, la merveilleuse histoire de la constitution de l’univers et qui leur présentait l’origine des dieux de leurs cités, de leurs temples et de leurs fêtes. De plus, la vie orphique, la singularité