recule pas, s’il le croit nécessaire, devant l’emploi de la force brutale ; s’il n’avait eu parfois recours à elle, il n’aurait pas servi son pays aussi bien qu’il l’a fait. Mais il ne se lance dans une entreprise qu’à bon escient, après avoir mis toutes les chances de succès de son côté. Était-il mal renseigné par ses correspondans de Johannesburg, gens de finance habiles, mais piètres politiques, qui lui représentaient les Boers comme dégénérés ? A-t-il cru trop lui-même à la puissance de l’argent sur eux, lui qui professe, prétend-on, que « tout homme à son prix » ? Le mouvement a-t-il éclaté plus tôt qu’il ne l’eût voulu ? Il est bien difficile de répondre à toutes ces questions.
L’extrême modération des Boers a aussi contribué à déjouer tous les plans de leurs adversaires. On espérait sans doute qu’au début du mouvement, ils essayeraient d’arrêter quelques meneurs, et provoqueraient ainsi des désordres qui serviraient de prétexte à l’entrée des troupes étrangères venant protéger la tranquillité publique ; que le gouvernement anglais se laisserait alors forcer la main, comme il l’a toujours fait, notamment à propos du Matabeleland, en face du fait accompli. Mais les Boers évitèrent avec soin de donner aucun prétexte de ce genre : le gouvernement, voyant qu’à Johannesburg même il serait le plus faible, ordonna à ses fonctionnaires de ne pas essayer de s’opposer par la force à ce que feraient les insurgés ; il retira même sa police. Enfin, après sa victoire il gracia encore le docteur Jameson, acte de clémence qui aurait été injustifiable, s’il n’eût été hautement politique.
L’invasion du Transvaal était d’ailleurs un acte de piraterie trop patent pour que les puissances européennes pussent le regarder avec indifférence. De pareils procédés ne sont jusqu’à un certain point excusables que lorsqu’on enlève des territoires à des peuples manifestement incapables de les exploiter. En est-il ainsi des Boers ? Mettent-ils réellement de sérieuses entraves a l’industrie minière ? Ne peut-on obtenir d’eux qu’ils en rendent l’exercice encore plus facile ? En un mot les réclamations des Uitlanders sont-elles justifiées ?
Les réformes économiques qu’ils demandent portent sur trois points : les lois douanières et les lois minières, celles surtout qui ont trait au travail des noirs, et les concessions de monopoles. Le tarif douanier frappe toutes les importations de droits de « 7 1/2 pour 100 de la valeur de facture qui doit représenter la valeur courante exacte de ces marchandises sur le lieu où l’exportateur les a obtenues ; dans le cas d’importations des pays d’outremer cette valeur est majorée de 20 pour 100 ». Sont exceptés de nombreux articles, notamment le bétail et tous les produits de