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roi des rois, disait cet article, iccialauccial (devra ou pourra ? ) se servir de la diplomatie italienne pour traiter toutes ses affaires avec les puissances européennes. » Le texte italien traduisit le mot iccialauccial par « devra » ; Ménélik soutint que ce mot voulait dire simplement : pourra, s’il lui plaît. « J’ai stipulé, écrivait-il dans une lettre adressée au mois de septembre 1890 au roi Humbert, que par amitié les affaires éthiopiennes pourraient être traitées par la diplomatie italienne, mais je n’ai pas entendu prendre cet engagement par traité. Votre Majesté doit comprendre qu’aucune puissance indépendante ne ferait jamais pareille chose. » Quant à la question de délimitation de frontière, l’empereur d’Ethiopie prétendit qu’il n’avait entendu céder par le traité d’Ucciali qu’une partie de l’Asmara, tandis que l’Italie lui réclamait la plus grande partie du Tigré. Le comte Antonelli, envoyé pour aplanir ces difficultés, ne put régler ni la question de frontière, ni la forme dans laquelle devait s’exercer le protectorat que l’Italie entendait s’arroger sur l’Ethiopie, et au mois de février 1893 le négus écrivit au roi Humbert qu’il entendait résilier le traité d’Ucciali et reprendre toute sa liberté d’action.

L’arrivée des troupes italiennes à la frontière choane a obligé Ménélik à quitter le terrain des protestations plus ou moins stériles et à entrer à son tour en action. Occupé à guerroyer dans le sud de l’Ethiopie, sur les confins éloignés des pays gallas, le monarque abyssin, comprenant toute l’étendue du danger, a rassemblé en hâte ses forces, et, au camp de Borromieda, a déclaré solennellement qu’il ne serait jamais le protégé de l’Italie et qu’il entendait avoir d’autres frontières du côté de l’Erythrée que celles qu’il avait consenties par le traité d’Ucciali, puis il s’est mis en marche vers le nord. Contians dans les intrigues qu’ils avaient nouées avec le roi du Godjam et le ras Makonnen, et aussi dans l’inaction où s’était complu jusqu’alors Ménélik, les Italiens avaient commis la lourde faute de réduire leurs troupes au minimum. C’est à peine si, au moment du désastre d’Amba-Alaghi, le corps d’occupation comptait 18 000 hommes, et encore, sur ce nombre, n’y avait-il que quatre bataillons européens. Ces troupes étaient d’ailleurs éparpillées un peu partout le long du littoral et sur le plateau ; il y avait des garnisons à Massaouah, à Kéren, à Asmara, a Kassala, à Makallé, etc., sur une longueur de 600 kilomètres. À l’extrémité de cette ligne démesurément étendue se trouvait le major Toselli, à Amba-Alaghi, sur la frontière choane.

Le 7 décembre 1895 le choc eut lieu. Les 2 500 hommes du major Toselli se trouvèrent aux prises avec l’avant-garde de l’armée abyssine, comprenant 20 000 hommes commandés par