restaurait au profit de l’un d’eux, elle ne serait pas le consentement de tous deux à une organisation meilleure, mais la défaite du plus faible ; et dans les deux cas cette lutte absorberait une partie des efforts que l’autre lutte aurait dû seule occuper.
Au lieu d’un seul gouvernement, — établi sur le territoire à la place la meilleure pour assurer la liberté de ses communications avec le pays entier et étendre partout une autorité constante et efficace, — il y avait deux gouvernemens : une autorité principale concentrée à Paris où elle était le moins utile et où elle allait devenir prisonnière ; en province, une délégation pauvre d’hommes, vide de pouvoirs, et sur laquelle pourtant tomberait tout le fardeau de soutenir et d’armer la France. Le jour où le lien de suzeraineté et de dépendance établi entre elles serait coupé, comme leur dernier fil de communication, par l’épée de l’assiégeant, le gouvernement de province n’aurait plus ni moyens d’obéir, ni droit de commander et le gouvernement de Paris, cessant d’exister pour la France, ne laisserait pour héritier qu’une anarchie. Si le patriotisme alors, révélant à la délégation l’importance de son rôle, la poussait à une usurpation nécessaire et à l’exercice d’une souveraineté indépendante, les deux centres de volonté et d’action vivraient étrangers l’un à l’autre ; leurs efforts, faute de concert, seraient moins redoutables à l’ennemi ; et quand, enfin, les deux gouvernemens pourraient reprendre contact, ce serait pour constater la profondeur des désaccords creusés entre eux par le silence, et la question de savoir lequel céderait à l’autre préparait entre eux une lutte encore.
L’erreur militaire s’est aggravée de l’erreur politique. Comme si ce n’était pas une entreprise assez difficile de repousser l’invasion, on y a joint la volonté de fonder un gouvernement, et l’on se promet que les deux œuvres, loin de se nuire, s’aideront. L’une dès le début absorbe l’autre. En se donnant les auxiliaires avec lesquels il va les entreprendre toutes deux, le gouvernement n’a pas même demandé s’ils possédaient la double aptitude qu’il eût fallu pour la double mission. Résigné à leur incompétence militaire, il ne s’est montré exigeant que sur leurs preuves républicaines. Fatalement, et à son exemple, ils oublieront l’intérêt militaire pour l’intérêt politique, négligeront ce qu’ils ignorent pour ce qui est la passion de leur vie, tiendront la défense pour une crise violente et passagère, la fondation du gouvernement pour l’œuvre essentielle et définitive ; l’obsession de cet avenir ne leur laissera voir, dans ce peuple à unir contre l’étranger, que des partisans à soutenir et des adversaires à combattre ; après que ces divisions auront affaibli la défense, l’échec de la défense, par